Développer la bodhichitta d’aspiration et d’engagement

[L’enregistrement de la session sur le verset 10, qui précédait cette session, a été perdu.]

(10) Ensuite, pour commencer, avec un sentiment d’amour envers tous les êtres limités, considérez tous les êtres errants, sans en excepter aucun, souffrant depuis la naissance, etc., dans les trois pires royaumes, et depuis la mort, le transfert [bardo], etc.

Brève révision

Nous avons parlé de l’amour et de la compassion. La compassion est l’attitude par laquelle nous souhaitons que tout le monde soit délivré de la souffrance, et l’amour est l’attitude par laquelle nous souhaitons que tout le monde soit heureux. Avant de pouvoir développer ces deux attitudes, il est nécessaire de s’entraîner dans les diverses méditations pour acquérir un état d’équanimité envers tout le monde. Nous devons également nous entraîner aux diverses méthodes pour égaliser et échanger nos attitudes à l’égard de nous-mêmes et des autres. 

La méditation en sept points sur la cause et l’effet pour développer la bodhichitta

  • Le développement de l’amour et de la compassion commence avec l’équanimité. Ce type particulier d’équanimité élimine aussi bien les attitudes d’attraction, de répulsion que d’indifférence en développant une attitude impartiale envers tout le monde.
  • L’étape suivante consiste à reconnaître tous les êtres comme ayant été notre mère dans une vie antérieure,
  • Suivie par le rappel de leur bonté. Il y a aussi un moyen spécial d’être conscient de la bonté des autres – c’est de se souvenir de leur bonté même quand ils n’ont pas été nos mères.
  • L’étape d’après est de méditer sur le moyen de les payer en retour de cette bonté.

Cela fait quatre étapes, bien que l’on ne compte parmi les sept points de la méditation sur la cause et l’effet que les trois qui découlent de l’équanimité. Pour se répéter, nous avons : l’équanimité ou une attitude impartiale, la reconnaissance de tous les êtres comme ayant été notre mère, le fait de se souvenir de leur bonté, et le souhait de rembourser cette bonté.

  • La cinquième étape est de développer ce qu’on appelle « l’amour chaleureux ». Il n’est pas nécessaire de faire des méditations séparées pour développer cette attitude d’amour chaleureux. Si nous avons médité correctement sur les quatre points mentionnés auparavant, en les faisant être précédés par l’équanimité, nous développerons alors automatiquement l’amour chaleureux. À cause de cela, on ne compte pas cette étape parmi les sept points de cette séquence.

Qu’est-ce que cet amour chaleureux ? C’est une attitude grâce à laquelle nous chérissons les autres, attitude qui nous ferait nous sentir très concernés et inquiets si quelque chose de mauvais leur arrivait. Bien que le terme « amour » soit utilisé assez fréquemment, ce genre d’amour chaleureux est légèrement différent de l’amour défini comme l’attitude avec laquelle nous souhaitons que tout le monde soit heureux. Chacun de ces genres d’amour met en jeu un sentiment légèrement différent.

  • Après cela, nous avons l’attitude de la compassion grâce à laquelle nous souhaitons que tout le monde soit délivré de la souffrance.
  • Nous faisons suivre cela en développant ce qu’on appelle la « résolution exceptionnelle ». Il s’agit de l’attitude grâce à laquelle nous prenons la responsabilité : « Je vais moi-même séparer tous les êtres de la souffrance et leur apporter le bonheur. »
  • Ensuite, nous méditons avec le mobile illuminant et l’objectif de la bodhichitta elle-même.

Il y a deux façons d’entraîner l’esprit à développer cette attitude illuminée de la bodhichitta. Le processus que nous venons juste de décrire est connu comme la méditation en sept points sur la cause et l’effet. Toutefois, il existe aussi une autre façon de faire.

Égaliser et échanger nos attitudes à l’égard de soi et d’autrui

Nous commençons de la même façon, en passant par les mêmes trois étapes jusqu’à se souvenir de la bonté des autres, et de la manière particulière de s’en souvenir. Plus spécifiquement :

  • Nous méditons sur l’équanimité,
  • Nous reconnaissons tous les êtres comme ayant été nos mères,
  • Et nous nous souvenons de la bonté de chacune comme dans cette précédente méditation.
  • Après cela, nous méditons sur l’égalisation de nos attitudes envers soi et autrui. Le genre d’équanimité en jeu ici est une manière différente d’égaliser notre attitude de celle de l’étape précédente. Ce que nous essayons de développer ici est une attitude grâce à laquelle nous souhaiterions être bénéfiques à tous de manière égale. Autrement dit, nous souhaitons non seulement être bénéfiques à nos amis mais également à nos ennemis. Nous essayons de développer un souci et un souhait égaux d’être bénéfique à tout le monde.
  • À ce stade, nous méditons sur toutes les fautes et tout ce qu’il y a de mauvais dans l’égoïsme et le fait de se chérir.
  • Ensuite, la prochaine étape consiste à penser à tous les avantages et bienfaits qui découlent de chérir les autres.
  • Nous reconnaissons alors les fautes de l’égoïsme et de se chérir, et les avantages de chérir les autres, les alternant un par un dans le cadre des dix actes destructeurs et des dix actes constructifs.
  • Puis nous réfléchissons à ce point : « Suis-je réellement capable d’échanger mes attitudes à propos de moi ou des autres ? » Nous devrions prendre la résolution de dire « oui », que nous sommes capables de le faire.
  • Nous devons alors prendre la ferme décision de faire vraiment les méditations de s’échanger contre les autres, lesquelles sont les moyens pour changer d’attitude. Précédemment, notre attitude était que nous pensions principalement seulement à nous et non aux autres. Dorénavant, nous ne devrions penser qu’aux autres et à la manière de leur être bénéfique, et de complètement écarter ou ignorer nos propres intérêts égoïstes. Parvenus à ce stade, nous prenons la puissante résolution : « Je vais juste totalement me consacrer à être bénéfique aux autres. » 

La compassion

Fondée sur cette ferme décision, l’étape suivante est de méditer comme auparavant sur la compassion. En d’autres termes, nous méditons sur l’attitude grâce à laquelle nous souhaitons que tout le monde soit séparé de la souffrance. Cela s’enchaînerait très bien avec ce qui a précédé. Pour développer cette compassion, nous devrions penser à une créature dans une situation terriblement difficile et douloureuse. Par exemple, nous pouvons penser à la manière dont les buffles sont tués dans certains endroits d’Asie. Ils sont tués avec un gourdin en bois ou un instrument de ce genre et ils sont matraqués sur la tête douze ou treize fois peut-être avant que la pauvre bête ne finisse par mourir. Nous devrions penser aux terribles souffrances qu’un tel animal endure quand on le tue.

De même, nous pouvons penser à la manière dont de grandes tortues sont tuées dans certains endroits où on découpe en tranche leur chair alors qu’elles sont encore vivantes. Nous devrions penser à ce genre de souffrance. Nous pouvons également penser à la manière dont de petites créatures marines sont mises à bouillir ou à frire vivantes et au genre de souffrance qu’elles endurent quand on les cuit de cette façon.

Ensuite, nous devrions penser : « J’ai commis touts les actes destructeurs et accumulé tout le potentiel karmique négatif pour renaître dans ce genre de situation et faire l’expérience du type de souffrance qu’elles endurent. » Puis, nous devrions penser à combien horrible ce serait, à quoi cela ressemblerait si nous étions vraiment dans la situation de ces sortes de créatures ?

Puis, de même, nous devrions penser à notre mère de cette vie et à la manière dont elle aussi a accumulé tellement de potentiel karmique négatif à partir de ses actions destructrices. Si elle devait renaître ainsi et endurer ce type de souffrance, comment cela serait-il ? Nous devrions penser à elle comme devant faire l’expérience de ce type de souffrance.

Une fois que nous sommes fortement conscients de l’expérience de ce genre de souffrance rapportée à notre propre mère, alors nous devrions pense à notre propre père. Après s’être entraîné à cela, nous pouvons élargir et penser à quelqu’un d’autre qui ne nous est pas nécessairement apparenté. Après avoir traité le cas d’une personne non apparentée, d’un étranger, alors nous penserions à un ennemi. Nous pensons que si lui ou elle devait faire l’expérience de cette épouvantable souffrance, combien terrible ce serait. À la suite de quoi, nous devrions penser dans la perspective de tous les êtres vivants et développer l’attitude grâce à laquelle nous ne pourrions pas supporter que quiconque fasse l’expérience de ce genre de souffrance. De cette façon nous développons la compassion, l’attitude de souhaiter que tout le monde soit libéré de la souffrance.

L’amour

Faisant suite au développement de la compassion, nous devrions méditer sur l’amour, l’attitude qui consiste à souhaiter que tout le monde soit heureux. Tout le monde veut être heureux, mais la plupart des gens ne connaissent pas les moyens qui les rendraient heureux. Certains recherchent le bonheur dans le confort matériel et l’argent. Quand ils n’ont pas atteint cet objectif et ne peuvent se payer quelque chose, il se peut qu’ils aillent voler, pensant que cela leur apportera le bonheur. En fait, cela ne fait que leur apporter de grands tourments, des difficultés et de la souffrance.

Des gens peuvent même aller jusqu’à commettre un meurtre pour être heureux, ou bien ils essayent d’obtenir une forme d’avantage sur les autres afin de faire advenir leur propre confort. Cependant, ces comportements ne sont en aucune façon des méthodes qui peuvent véritablement apporter le bonheur. Nous devrions essayer de développer cette attitude d’amour grâce à laquelle nous souhaitons apporter le bonheur à tout le monde.

Les quatre incommensurables

Parvenus à ce point de notre méditation, nous pouvons introduire les méditations sur les « quatre attitudes incommensurables ». Chaque méditation incommensurable comporte quatre étapes. Par exemple, avec la compassion incommensurable :

  • On développe en premier « l’intention incommensurable » de souhaiter : « Comme ce serait merveilleux si tous les êtres étaient libérés de la souffrance. »
  • Puis « l’aspiration incommensurable » : « Puissent-ils être séparés de leur souffrance. »
  • Ensuite vient la « résolution exceptionnelle incommensurable » : « Puissé-je moi-même faire en sorte que cela advienne. Je les séparerai de leur souffrance. »
  • Enfin, la « requête incommensurable » dans laquelle nous visualisons devant nous un bouddha ou un objet de refuge et faisons la requête qu’ils nous inspirent afin que nous soyons véritablement en mesure de faire cela : délivrer tous les êtres de leur souffrance.

De même, la méditation sur chacune des quatre attitudes incommensurables comporte quatre étapes.

Nous continuons ce processus en quatre étapes avec l’amour incommensurable en pensant :

  • « Comme ce serait merveilleux si tous les êtres jouissaient du bonheur »
  • « Puissent-ils avoir le bonheur »
  • « Puissé-je être en mesure de leur apporter le bonheur »
  • Ensuite, faisant la requête aux bouddhas visualisés ou aux gourous en face de nous : « De grâce, inspirez-moi pour être capable de faire cela : leur apporter le bonheur. »

Nous continuons la méditation en quatre parties avec la joie incommensurable. Ici, nous sommes complètement joyeux à l’idée de penser : comme il serait merveilleux si tout le monde ne rencontrait jamais la souffrance et était toujours heureux. Nous suivons le même processus :

  • En pensant d’abord à l’intention incommensurable de souhaiter : « Comme ce serait merveilleux si tous les êtres ne rencontraient jamais la souffrance et étaient toujours heureux ».
  • Nous formons alors l’aspiration incommensurable : « Puissent-ils devenir ainsi. »
  • Comme auparavant cela est suivi par la résolution exceptionnelle incommensurable : « Puissé-je être en mesure de les amener à ne jamais être séparés du bonheur. »
  • Enfin, nous faisons la requête incommensurable, à nouveau, de demander aux gourous de nous inspirer pour être capables de faire cela.

L’étape finale est l’équanimité incommensurable, le souhait que tous les êtres soient libres d’attachement, d’aversion et de partialité. De nouveau, nous commençons par :

  • « Comme ce serait merveilleux si tous les êtres étaient libres d’attachement, d’aversion et de partialité. »
  • Puis : « Puissent-ils toujours être libres d’attachement, d’aversion et de partialité. Puissent-ils posséder l’équanimité. »
  • Ensuite : « Puissé-je être capable de faire en sorte qu’ils soient toujours impartiaux. »
  • Suivi par la requête aux gourous et aux bouddhas de nous inspirer afin d’être en mesure de le faire. 

De la sorte, nous avons les quatre attitudes incommensurables :

  • La compassion incommensurable
  • L’amour incommensurable
  • La joie incommensurable
  • L’équanimité incommensurable.

Telle est la façon dont nous méditons sur ces quatre incommensurables, chacune comportant quatre parties comme nous venons juste de le décrire. De la sorte, il y a en réalité seize sujets impliqués dans cette méditation. 

Prendre et donner, Tonglen

Nous devrions non seulement penser à ce que tous les êtres soient libérés de leur souffrance, mais nous pouvons aussi envisager de faire de plus amples méditations au cours desquelles nous pensons activement à prendre sur nous la souffrance des autres. Nous devrions imaginer les autres dans des situations difficiles et la manière dont ils font l’expérience d’une grande quantité de souffrance. Puis nous devrions imaginer dans notre visualisation que toute leur souffrance les quitte par leur narine gauche, et qu’elle sort pour entrer en nous. Nous acceptons et prenons sur nous leur souffrance.

Nous pouvons faire cette pratique dans le cadre de notre processus de respiration. Quand nous inspirons, nous devrions imaginer que nous prenons sur nous toute leur souffrance par notre narine droite et celle-ci pénètre en nous. De cette façon, nous les libérons de leur souffrance et prenons la souffrance sur nous. Une fois que nous avons éliminé toute leur souffrance et l’avons prise sur nous en inspirant, alors avec notre expiration, quand nous exhalons, nous devrions imaginer que nous leur donnons diverses choses afin de leur être bénéfique.

En premier, nous devrions penser à leur donner une précieuse renaissance humaine comme base de travail pour être capables de pratiquer. Nous devrions alors penser à tout le potentiel positif – toutes les racines constructives issues des actes constructifs que nous avons faits – qui mûrirait dans le fait d’avoir une précieuse renaissance humaine dans le futur et nous imaginons que tout cela nous quitte par nos narines tandis que nous expirons pour aller mûrir sur ces autres êtres.

Ensuite, nous devrions penser à donner aux autres un endroit parfait pour vivre, où ils auront tout ce qui est propice à leur pratique du Dharma. De nouveau, nous devrions raisonner en termes de racines issues des actions constructives que nous avons faites, lesquelles mûriraient sous forme d’un parfait endroit où vivre. Nous imaginons que nous envoyons ces choses et les donnons aux autres êtres en sorte qu’elles mûrissent sur eux. Nous devrions aussi imaginer que nous leur envoyons toutes les commodités appropriées et les objets vers les lieux où ils vivent, qui seraient propices à leur pratique.

Puis, dans notre visualisation, nous devrions imaginer leur envoyer nos maîtres et tous leurs enseignements sur les diverses pratiques. Nous devrions imaginer que toutes les racines en nous issues de nos actions constructives, racines qui mûriraient en nos propres réalisations du renoncement, du mobile illuminant de la bodhichitta, du vide et de tous les autres sujets du Dharma, mûrissent sur tous ces autres êtres et qu’ils acquièrent ces réalisations. En bref, ce que nous devrions souhaiter et pratiquer est que la souffrance de tout le monde mûrisse en nous et que tout notre bonheur et nos bonnes choses mûrissent en eux.

Le grand lama Kalu Rimpotché décrivit un vieil homme dans la région du Kham d’où il était originaire qui fit ce genre de pratique pour quelqu’un qui avait une très vilaine maladie et blessure à la tête. Il fit cette pratique : « Puisse cette maladie tomber sur moi », et il fut réellement capable de prendre cette maladie sur lui et de guérir cette autre personne.

Pour passer les choses en revue, nous avons l’attitude de la compassion, le souhait que tous les êtres soient libérés de leur souffrance ; l’attitude de l’amour, le souhait que tout le monde soit heureux ; et, pour couronner le tout, la résolution exceptionnelle : « Je prendrai sur moi la responsabilité de leur apporter le bonheur et de les libérer de leur souffrance. » Si nous réfléchissons à qui a la capacité de vraiment faire cela, d’apporter le bonheur à tous les êtres et de les libérer de leur souffrance, nous pouvons voir que nous n’avons pas nous-mêmes cette capacité maintenant, et que seul un bouddha en dispose. C’est pourquoi, nous devrions développer le souhait puissant : « Je dois moi-même atteindre l’état d’illumination d’un bouddha afin d’être véritablement capable de faire cela. » Une telle attitude ou motivation est connue comme le « mobile illuminant de la bodhichitta ».

Le mobile illuminant de la bodhichitta

Deux choses sont impliquées dans le développement de ce mobile illuminant de la bodhichitta :

  • L’intention d’être bénéfique à tous les êtres vivants
  • Pour être en mesure de le faire, l’intention de travailler à réaliser l’état illuminé d’un bouddha.

Souhaiter simplement atteindre l’état illuminé d’un bouddha n’est pas en soi suffisant pour être considéré comme de la bodhichitta. La bodhichitta doit comporter l’intention grâce à laquelle nous souhaitons atteindre l’illumination afin d’être en mesure d’être bénéfique à tous les autres.

Nous concentrons alors nos attitudes d’amour et de compassion sur tous les êtres avec l’intention de la bodhichitta de les libérer de la souffrance et de leur apporter le bonheur grâce à notre réalisation de l’illumination. L’aspect que cet état d’esprit prend au regard de la compassion est de souhaiter que les autres soient libérés de la souffrance. Parce que l’objectif de cet esprit prend pour objet tous les êtres vivants, les bénéfices de développer une telle attitude sont égaux en nombre au nombre infini d’êtres qui existent.

Accomplies de cette façon, les qualités positives qui consistent à développer cette attitude sont extrêmement vastes. Même si nous développons le souhait dans le cas d’une seule personne – « Puisse cette personne être délivrée de son mal de tête » – c’est quelque chose de très bénéfique. Cependant, si nous pensons non seulement à une personne mais à tous les autres êtres, alors c’est encore plus puissant et bénéfique.

L’état d’engagement de la bodhichitta d’aspiration

Atisha poursuit :

(11) Alors, avec le souhait que tous les êtres errants soient libérés de la souffrance de la douleur, de la souffrance et des causes de la souffrance, engendrez la bodhichitta d’engagement grâce à laquelle vous ne reviendrez jamais en arrière.

Tout ce dont nous avons discuté jusqu’à présent traitait de ce qu’on appelle « l’état d’aspiration à la bodhichitta ». Une fois que nous avons d’abord développé ce simple état de souhait de la bodhichitta d’aspiration, nous devons l’améliorer plus avant en le générant encore et encore. De même, nous devrions avoir l’attitude suivante : « Je n’abandonnerai jamais ce mobile illuminant de la bodhichitta, cette intention d’atteindre l’illumination afin d’être bénéfique aux autres. Je ne l’abandonnerai jamais jusqu’à ce que j’atteigne réellement l’illumination. »

Il s’agit de l’état d’engagement à la bodhichitta d’aspiration, où nous avons donné notre promesse et nous sommes engagés à sauvegarder cet esprit de la bodhichitta et de ne pas l’abandonner jusqu’à ce que nous ayons réellement atteint l’illumination.

C’est ce que veut dire le texte quand il parle de la bodhichitta d’engagement grâce à laquelle vous ne reviendrez jamais en arrière.

Les bienfaits de développer la bodhichitta

Le développement de la bodhichitta recèle de très grands bénéfices, et Atisha en fait mention ici dans le texte :

(12) Les bénéfices qu’il y a à générer un état d’esprit d’aspiration comme celui-là ont été minutieusement décrits par Maitreya dans Le Soutra déployé comme un tronc d’arbre.

Le Soutra déployé comme un tronc d’arbre (sDong-po bkod-pa’i mdo, skt. Gandavyuha Sutra) décrit les bienfaits de développer la bodhichitta en s’aidant de plus de deux cents exemples. Dans le Compendium de l’entraînement (bSlab-btus, skt. Shikshasamucchaya), Shantideva décrit seize exemples ou analogies des bienfaits de développer ce mobile illuminant de la bodhichitta. Si nous devions commencer à décrire tous les bienfaits, il n’y aurait pas de fin ; donc, à l’avenir, interrogez les nombreux bons guéshés à ce sujet et instruisez-vous, dans la mesure où ce serait très bénéfique à la pratique de tout un chacun.

Atisha fait référence à ce point comme suit :

(13) Un fois que vous avez lu ce soutra ou en avez entendu parler par votre gourou, et êtes devenu conscient des bienfaits sans bornes de la pleine bodhichitta, alors, en tant que cause pour le rendre stable, générez cet état d’esprit encore et encore.

Ceci fait référence au fait que nous devrions méditer sur le mobile illuminant encore et encore. Développer un tel mobile illuminant sur nos continuums mentaux apporte des bienfaits qui n’ont pas de fin ; ils sont incalculables, sans fond.

Un exemple des bienfaits qu’on peut brièvement donner est que si un tel mobile devait avoir une forme physique, l’espace entier de l’univers ne serait pas assez grand pour le contenir. Ce mobile serait trop grand pour véritablement tenir dans l’univers. Sa taille excéderait cette mesure.

Un autre exemple est de penser aux grains de sable au fond de tous les océans et sur leurs rives, et de penser aux bouddhas comme étant égaux au nombre de tous ces grains de sable. Si nous devions faire des offrandes à chacun de ces bouddhas avec des pierres précieuses cela remplirait l’univers entier, malgré tout, le potentiel positif obtenu grâce à cela n’égalerait pas la quantité de potentiel positif que nous obtiendrions en développant le mobile illuminant de la bodhichitta. 

Le texte poursuit :

(14) La force positive de ceci est démontrée de façon exhaustive dans Le Soutra requis par Viradatta. Comme cela est résumé dans ce texte en simplement trois stances, laissez-moi les citer ici.
(15) « Si la force positive de la bodhichitta avait une forme, elle remplirait complètement la sphère de l’espace et même au-delà.
(16) Bien que quelqu’un puisse totalement remplir de joyaux des champs-de-bouddha égaux en nombre aux grains de sable du Gange et les offrir aux Gardiens du Monde,
(17) Néanmoins, si quelqu’un, homme ou femme, joignait ses mains et dirigeait son esprit vers la bodhichitta, son offrande serait encore plus spécialement noble ; elle n’aurait pas de fin. »

En outre, une fois que nous avons développé un tel mobile illuminant, il est extrêmement important de le faire s’augmenter et croître encore plus fortement. Pour ce faire, nous devons accumuler une grande quantité supplémentaire de potentiel positif. Nous faisons cela grâce aux quatre entraînements pour que le développement de notre bodhichitta ne décline pas dans cette vie.

  • Premièrement, la chose que nous faisons afin d’améliorer notre mobile de bodhichitta est de nous rappeler les bienfaits d’avoir une telle attitude,
  • Et deuxièmement, de réaffirmer son développement en la générant à nouveau trois fois chaque matin et trois fois chaque soir.
  • Troisièmement, nous devrions faire autant d’offrandes que nous pouvons aux Trois Joyaux. Cela pourrait même être l’offrande d’un simple verre d’eau, comme dans un bol, ou d’offrir un simple bâton d’encens, voire une simple fleur. Nous pouvons également faire des offrandes à nos parents, ou à divers membres de la communauté monastique, le Sangha, et leur offrir nourriture et boisson, des choses de ce genre. Cela aussi est extrêmement bénéfique. C’est bénéfique également de faire des offrandes aux divers esprits invisibles des alentours avec des miettes de biscuits, des choses de ce genre. Nous devrions aussi apporter de l’aide aux pauvres et aux nécessiteux, et à celles et ceux qui sont malades. De même, répandre sur le sol ne serait-ce que du sucre pour les fourmis afin qu’elles le mangent est extrêmement bénéfique.
  • Le quatrième point est que nous ne devrions jamais abandonner quiconque et décider de ne pas travailler pour le bien de cet être. Nous ne devrions jamais abandonner personne.

Ce sont les quatre entraînements auxquels Atisha fait référence dans le verset suivant :

(18) Ayant engendré les états d’aspiration à la bodhichitta, renforcez-les toujours au prix de nombreux efforts ; et, afin d’en être pleinement conscients dans cette vie et les autres aussi, sauvegardez également avec grand soin les entraînements expliqués dans les textes.

La cinquième recommandation est que nous devrions nous débarrasser des quatre sortes de comportement sombre pour ne pas perdre notre mobile et objectif de bodhichitta dans les vies futures.

  • Le premier de ces actes sombres – littéralement « noirs » – serait de sciemment tromper ou décevoir nos parents, nos professeurs, nos maîtres spirituels ou nos gourous.
  • Le deuxième est d’avoir des arrière-pensées autres que le mobile illuminant de la bodhichitta. Autrement dit, avoir des raisons cachées autres que la résolution exceptionnelle et d’avoir une attitude prétentieuse et décevante envers les autres.
  • Le troisième est de pousser les autres à regretter les actions constructives qu’ils ont commises.
  • Le quatrième est de critiquer ou de dire de mauvaises choses à propos d’un bodhisattva.

Leurs antidotes sont leurs opposées, à savoir les quatre actions lumineuses – littéralement « blanches ».

  • Pour la première, nous ne devrions jamais décevoir ou tromper, ou dire des mensonges à nos parents, nos professeurs et nos maîtres spirituels.
  • La deuxième est que nous ne devrions jamais être prétentieux ou avoir des attitudes décevantes envers les autres ; au contraire, nous devrions toujours essayer de reconnaître tout le monde comme nos maîtres.
  • L’antidote au fait de faire que les autres regrettent les actions constructives qu’ils ont commises, est d’essayer de guider tout un chacun vers le développement de l’amour, de la compassion et du mobile illuminant de la bodhichitta.
  • La quatrième est que nous devrions voir tout le monde sous une pure apparence. Autrement dit, nous ne devrions jamais critiquer ni dire de mauvaises choses sur les autres.

Si nous suivons ce conseil et ce genre d’entraînement, non seulement le développement de notre mobile illuminant de bodhichitta ne dégénérera pas pendant cette vie, mais il ne dégénérera pas non plus dans les vies futures. 

Le stade d’engagement à la bodhichitta

Il ne suffit pas d’avoir seulement l’état d’aspiration à la bodhichitta. Nous devons également avoir ce qu’on appelle « l’état d’engagement à la bodhichitta », le stade dans lequel nous sommes véritablement engagés dans les pratiques qui nous mèneront à l’illumination. Ce que nous avons décrit jusqu’à présent est simplement le stade d’aspiration à la bodhichitta.

Quel est cet état d’engagement à la bodhichitta ? C’est l’attitude qui ne se contente pas de simplement souhaiter atteindre l’état illuminé d’un bouddha afin d’être bénéfique aux autres, mais qui affirme plutôt : « Je dois vraiment m’engager dans les pratiques qui me conduiront à cet état. » Il s’agit principalement de la pratique des six attitudes de longue portée – les six paramitas, les six perfections. Être engagé dans ces pratiques est connu comme « l’état d’engagement à la bodhichitta ».

Par exemple, si nous pensions nous rendre en Inde, alors toutes nos pensées et intentions orientées vers ce but seraient analogues à l’état d’aspiration à la bodhichitta. Cependant, souhaiter ou aspirer simplement aller en Inde n’est pas suffisant pour s’y rendre. Ce que nous devons véritablement faire, c’est nous enquérir de billets, de visas et des modalités du voyage, acheter les billets, etc. Être engagé dans toutes ces différentes sortes d’activités serait analogue à l’état d’engagement à la bodhichitta. 

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