Détail des vœux de bodhisattva (4 à 10)

Nous avons parlé des vœux de bodhisattva et nous avons jeté un coup d’œil sur le rôle qu’ils jouent sur la voie bouddhique. Auparavant, nous avons vu que pour les prendre, on doit déjà s’être développé et avoir progressé sur cette voie au moyen des différentes étapes du lam-rim, les stades gradués des cheminements de l’esprit. Nous devons également nous être entraînés à développer l’esprit de bodhichitta. Et, grâce au développement de la bodhichitta, nous devons réaliser en premier le stade d’aspiration au moyen duquel nous souhaitons tout simplement atteindre l’illumination pour le bien des autres, stade qui comprend cet aspect seulement ; ensuite, nous devons réaliser le stade d’engagement grâce auquel nous promettons de ne jamais abandonner cet état d’esprit. Et nous avons examiné les pratiques qui accompagnent cet état d’engagement. Puis, nous avons examiné très brièvement la manière de prendre les vœux de bodhisattva, et quelle est la nature d’un vœu. 

Puis nous avons abordé la discussion concernant les vœux de bodhisattva eux-mêmes et avons parcouru les trois premiers. Le premier concernait le fait de faire son éloge, de se vanter et/ou de rabaisser les autres. Ce qui signifie soit se livrer aux deux comportements, soit s’adonner à l’un ou à l’autre séparément. Et nous avons vu que ce qui est stipulé dans ce cas c’est que la personne à qui on tient de tels propos soit dans une position inférieure à la nôtre. Et notre motivation, quand on fait son propre éloge, devrait être le désir ou l’envie de recevoir quelque chose de cette personne dans une position inférieure – que ce soit un profit matériel, une louange, de l’amour ou du respect. Tandis que la motivation pour rabaisser autrui serait la jalousie – nous sommes jaloux de cette personne. Peu importe si ce que nous disons est vrai ou faux.

Il existe un vœu de bodhisattva secondaire similaire à celui-ci (faire son éloge, se vanter et/ou rabaisser les autres), mais la motivation en est différente. Dans ce cas il s’agirait de l’orgueil : nous sommes très fiers de nous-mêmes et très hautains – autrement dit, on prend de grands airs. « Comme je suis merveilleux », ce genre de chose, puis on fait son propre éloge. Telle serait la motivation dans ce cas plutôt que de chercher à obtenir quelque chose de la personne devant qui nous nous vantons. Tandis que la motivation pour rabaisser quelqu’un serait la colère (nous ne l’aimons tout simplement pas), plus que le fait d’être jaloux de lui.

Nous voyons donc que dans le cas du premier vœu, celui qui est un vœu-racine, la motivation initiale, à savoir faire son propre éloge parce que nous cherchons à obtenir quelque chose de la personne devant qui nous nous vantons, consiste réellement à exploiter l’autre personne et non pas à essayer vraiment de l’aider mais d’en tirer quelque chose. C’est donc beaucoup plus dommageable pour notre comportement de bodhisattva que de simplement se vanter parce que nous sommes tellement fiers et arrogants. De même, rabaisser l’autre personne parce que nous sommes jaloux d’elle, une fois encore, cela a à voir avec le fait d’être jaloux parce que nous voulons obtenir quelque chose que cette autre personne possède, comme d’avoir beaucoup de disciples. À nouveau cela est dommageable vis-à-vis d’autrui, des gens que nous pourrions aider. Alors que le fait de rabaisser quelqu’un simplement parce que nous ne l’aimons pas ou que nous sommes en colère après lui n’implique pas vraiment les autres gens que nous essayons d’aider. Nous voyons donc pourquoi l’un est un vœu-racine de bodhisattva et l’autre un vœu secondaire. Le plus important, le plus grave, c’est de causer du tort à notre façon d’aider les autres.

Le deuxième vœu consistait à ne pas partager les enseignements du Dharma, ou notre fortune,  nos biens, ou notre temps. Dans ce cas, la motivation est celle de l’attachement et de l’avarice, ce qui signifie vouloir tout garder pour soi. C’est donc très préjudiciable à notre capacité à aider les autres. Tandis qu’il existe un vœu secondaire de bodhisattva presque identique intitulé « ne pas dispenser le Dharma à qui veut l’apprendre ». Dans ce cas, la motivation n’est pas que nous voulons tout garder pour nous-mêmes mais plutôt celle-ci : « Je suis en colère ou je n’aime pas cette autre personne, aussi je ne veux pas l’enseigner » ; ou bien, par dépit rancunier – elle a fait quelque chose qui ne m’a pas plu et donc en retour je serai méchant avec elle ; ou encore, on est jaloux du fait que si on enseigne cette autre personne son développement s’accroîtra et elle deviendra plus célèbre que moi ; ou enfin, cela pourrait être par paresse ou par indifférence : « Je n’en ai rien à faire ». En conséquence, le vœu de ne pas enseigner ou partager le Dharma à cause de ces motivations est fondamentalement dû à nos propres émotions perturbatrices, alors que si nous n’enseignons pas parce que nous voulons garder les choses pour nous, cela est dû à notre égoïsme. Donc ne pas le faire par égoïsme, tout garder pour soi est ce qui va le plus à l’encontre de la conduite d’un bodhisattva qui est de donner aux autres.

Enfin, le troisième vœu était de ne pas écouter les excuses des autres ou de les frapper, de les battre, la motivation pour l’un ou l’autre de ces comportements étant principalement la colère. Cela fait référence à une situation réelle où nous crions après quelqu’un ou le battons, et il se trouve que cette personne nous demande : « S’il vous plaît, pardonnez-moi, arrêtez », ou que quelqu’un d’autre le demande à sa place et que nous ne le faisons pas, que nous n’arrêtons pas. Par ailleurs, il existe un vœu secondaire qui est de refuser les excuses d’autrui, et cela se rapporte à un moment ultérieur, quand nous gardons rancune envers cette autre personne et qu’elle demande notre pardon ou s’excuse plus tard. Le premier cas est plus lourd, en tant que vœu-racine de bodhisattva, car quand nous sommes en colère et que nous frappons vraiment l’autre personne, alors bien sûr nous devons arrêter. Quand cela se passe plus tard, nous gardons tout simplement rancune ; nous ne sommes pas en train de frapper la personne physiquement ou de la blesser verbalement à ce moment-là, c’est pourquoi il s’agit d’un vœu secondaire, c’est moins fort, moins lourd. Autrement dit, dans la première situation nous frappons vraiment l’autre personne, dans la seconde situation, il est probable que nous l’ignorions tout simplement. 

(4) Écarter les enseignements du Mahayana et en proposer de faux

Le quatrième vœu de bodhisattva consiste à éviter de mettre de côté les enseignements du Mahayana et d’en proposer de faux. Dans ce cas, d’une part, rejeter les enseignements corrects du Mahayana au sujet des bodhisattvas, c’est une chose, et d’autre part, fabriquer ou inventer quelque chose de faux qui ressemble aux enseignements du Mahayana tout en prétendant que ce sont là d’authentiques enseignements du bouddhisme, c’en est une autre. Cela ne nous concerne pas nous simplement – nous inventons une fausse compréhension que nous ne connaissons pas vraiment, car nous ignorons de quoi il s’agit – mais cela a à voir avec le fait que nous savons ce que sont les vrais enseignements, et que nous les rejetons parce que nous ne les aimons pas et fabriquons quelque chose d’autre à la place que nous trouvons plus confortable. Cela ne revient pas à les garder pour nous, mais nous les enseignons aux autres afin qu’ils nous suivent en tant qu’enseignant. Dès lors, il s’agit d’une rupture du vœu de bodhisattva.

Un exemple : Nous cherchons à devenir un gourou très populaire parmi les gens, avec une approche très libérale envers le sexe, en conséquence, nous mettons de côté les enseignements bouddhiques concernant les comportements sexuels inappropriés, lesquels recensent toutes sortes d’activités sexuelles communément pratiquées par la plupart des gens, pratiques que ceux-ci ne seraient pas très contents de devoir abandonner, et, au lieu de cela, nous enseignons que la conduite correcte d’un bodhisattva en matière de sexe consiste juste à ne blesser personne par ce que l’on fait. Nous savons en quoi consistent les enseignements corrects, mais nous pensons : « Bon, si j’enseigne ça, tout le monde va s’en aller, personne n’acceptera le bouddhisme, j’enseignerai donc une version beaucoup plus édulcorée et dirai que c’est vraiment ce que le Bouddha voulait dire », ceci afin d’avoir plus de disciples. Le fondement de l’éthique bouddhique est de nous montrer les divers types de comportements à éviter parce que motivés par de très fortes émotions perturbatrices. Dans le cas d’un comportement sexuel, il s’agit habituellement d’une forte convoitise et d’un très puissant désir. Donc, la base de l’éthique sexuelle dans le bouddhisme est pleinement destinée à nous aider à diminuer l’expression physique de nos pensées de convoitise et de luxure. C’est très différent de notre vision occidentale humanitaire libérale, laquelle repose sur une éthique fondée sur le fait de ne pas causer de tort à autrui.

Inventer des enseignements de cette sorte et prétendre que c’est vraiment ce que le Bouddha préconise, et l’enseigner aux autres afin qu’ils nous suivent, c’est vraiment les tromper. Ce n’est pas leur donner le véritable et authentique Dharma. Maintenant, si vous enseignez, faites une différence, comme je le fais, entre le « Dharma allégé » et le « Dharma authentique ». Et soyez parfaitement clair sur le fait que le Dharma allégé n’est pas le véritable Dharma, mais qu’il s’agit seulement d’un niveau plus facile à pratiquer dans le cadre de cette vie, avec la seule pensée d’en faire bénéficier cette vie. C’est pourquoi enseigner, comme premier pas sur le chemin de l’éthique bouddhique, d’éviter de blesser quiconque par notre comportement sexuel, cela est juste, aussi longtemps que nous ne disons pas qu’il s’agit de l’enseignement du Bouddha, et que c’est là tout l’objectif du bouddhisme. Car, bien entendu, le Bouddha et le bouddhisme seraient d’accord sur le fait de ne pas blesser autrui par notre comportement sexuel. Mais ce n’est pas le seul point proposé par le Mahayana, bien qu’ici il ne s’agisse pas seulement du Mahayana mais des enseignements bouddhiques en général. Les enseignements bouddhiques ont pour but de conduire les autres à la libération et à l’illumination et pour cela on doit surmonter la convoitise et le désir ardent.

(5) Prendre des offrandes destinées aux Trois Joyaux

Le cinquième vœu de bodhisattva consiste à ne pas prendre les offrandes destinées aux Trois Joyaux (le Bouddha, le Dharma, le Sangha), et c’est quelque chose que nous faisons le vœu d’éviter. Cela signifie soit voler, soit détourner – c’est-à-dire servir notre propre profit personnel, ou pousser quelqu’un à le faire pour nous – n’importe quelle offrande appartenant au Bouddha, au Dharma, au Sangha, et la considérer comme nôtre. Donc si quelqu’un  fait une offrande au Bouddha, au Dharma, et au Sangha, à un centre bouddhique par exemple, ou pour faire une statue, ou pour imprimer ou traduire des livres du Dharma, ou pour nourrir un groupe de moines ou de nonnes, et que nous prenons cet argent ou cette offrande pour nous-même, c’est inapproprié. Il s’agit d’une transgression du vœu. Dans ce contexte, le Sangha fait référence à n’importe quel groupe de plus de quatre moines ou nonnes. Il n’est pas fait ici référence à l’Arya Sangha.

Maintenant, bien sûr, si nous travaillons – mettons que nous travaillons à traduire ou publier des textes du Dharma –, si une offrande d’argent est faite et qu’elle est utilisée pour notre salaire, il s’agit là de quelque chose d’autre parce que nous travaillons vraiment à promouvoir le Bouddha, le Dharma et le Sangha, dans le cadre d’un contrat standardisé stipulant que nous sommes payés pour notre travail. Mais, ici, on parle du cas où l’on n’est pas spécifiquement impliqué dans un travail bouddhique et qu’on reçoit des offrandes et des dons pour soi-même.  

Pourquoi s’agit-il ici d’un vœu-racine de bodhisattva ? Parce que quand des offrandes sont faites pour promouvoir le Bouddha, le Dharma et le Sangha, c’est dans le but de favoriser 

et de rendre disponibles les enseignements bouddhiques pour aider les autres à atteindre la libération et l’illumination, ce qui en tant que bodhisattva est ce que nous essayons de faire, à savoir rendre accessibles ces méthodes. Cela ne veut pas dire être un missionnaire mais de faire en sorte que ces méthodes soient disponibles pour aider autrui. Alors qu’en volant, on empêche cela. Bien, tel est le cinquième vœu de bodhisattva.

(6) Renoncer au Saint Dharma

Le sixième vœu consiste à éviter de renoncer au Saint Dharma. Cela fait appel à la notion  de « répudiation ». Répudier ne signifie pas juste renier mais tenter de rejeter une chose sous l’effet de la colère. Donc on répudie ou, en proclamant à voix haute notre opinion, on incite les autres à le faire. De quoi parlons-nous ici ? Qu’est-ce que nous répudions ? Est-ce que ce sont les enseignements textuels des shravakas, des pratekyabouddhas – deux branches du Hinayana – ou les véhicules du Mahayana, dans la mesure où l’un quelconque de ces enseignements sont les paroles du Bouddha. Nous essayons de réfuter que tels étaient les mots du Bouddha. Donc, ici, on dénie ou on réfute fortement le fait que n’importe lequel des textes de l’une de ces divisions, que ce soit ceux du Hinayana ou du Mahayana, sont bien les enseignements du Bouddha, dans leur totalité, ou juste certains de ces textes. La question c’est que tous les différents textes, tous les différents véhicules enseignés par le Bouddha étaient destinés à aider les gens à atteindre la libération ou l’illumination – pas seulement les gens, tous les êtres – et en disant qu’ils ne furent pas enseignés par le Bouddha, en fait on dit que ce n’est pas du bouddhisme, et ainsi on décourage les autres à suivre certains enseignements qui pourraient leur être très bénéfiques et leur convenir.

On doit examiner cela un peu plus soigneusement, car si on regarde cela d’un point de vue logique bouddhique historique, prétendument scientifique, en se fondant sur la langue des divers textes, etc., alors les érudits rompus à la méthodologie occidentale argueraient que de nombreux textes, tels ceux du Mahayana et des tantras, sur cette seule base de la langue, furent écrits bien après l’époque du Bouddha. Ils ne pouvaient donc vraisemblablement pas avoir été enseignés par le Bouddha historique. Mais la question c’est qu’aucun des enseignements ne furent couchés par écrit à l’époque du Bouddha et que tous furent transmis oralement, ce qui implique que les gens disposaient d’une mémoire phénoménale à cette époque et qu’ils pouvaient mémoriser tous les différents enseignements du Bouddha – pas nécessairement leur totalité par une seule personne – et qu’ils furent transmis et mémorisés de génération en génération.

En réalité, ce n’est pas si farfelu ni absurde si on pense à la coutume moderne qui prévaut dans les monastères tibétains. Ce n’est pas si incroyable dans la mesure où dans les monastères actuels, chaque département d’un monastère – je pense aux principaux monastères guélougpas – est responsable d’un texte particulier des tantras et de ses rituels, etc. Ainsi on demande à tous les moines de mémoriser tous les textes de cette série particulière de textes, et donc, si on prend l’ensemble des enseignements du Bouddha et qu’on a chaque petit département de chaque monastère responsable de tel ou tel soutra, alors il est tout à fait crédible qu’il ait pu s’instaurer une transmission orale de tous les enseignements du Bouddha de cette façon, sans que rien n’ait été consigné par écrit. Même maintenant, les religieux tibétains mémorisent des milliers de pages de textes, car ils commencent à les apprendre par cœur quand ils sont enfants vers l’âge de sept ou huit ans, or le cerveau humain est tout à fait capable de mémoriser et de retenir pour le restant de la vie des choses qu’il a apprises à un si jeune âge.

Selon la tradition, les textes du Hinayana étaient récités plus ouvertement que ceux du Mahayana, lesquels à leur tour étaient d’un accès plus facile que ceux des tantras. Néanmoins, ils étaient tous transmis de cette façon par voie orale. Et quand les textes furent finalement couchés par écrit, l’une des injonctions du Bouddha était également de donner les enseignements dans toutes les différentes langues, donc de les rendre disponibles dans votre propre langue. Il n’y a donc pas de contradiction à ce que la langue dans laquelle un texte est apparu pour la première fois soit celle d’une période historique particulière lors de son apparition. Certains textes furent donc rédigés en pali, d’autres textes (quand ils furent finalement couchés par récrit) le furent en sanskrit, d’autres enfin furent rédigés dans un sanskrit tardif. Et cela est cohérent avec la méthodologie recommandée par le Bouddha lui-même et ne prouve pas nécessairement que le texte ne venait pas du Bouddha.

À ce sujet, Shantideva lui-même a donné une excellente réfutation envers ceux qui argumentaient sur le fait que les textes du Hinayana sont valides et authentiques contrairement à ceux du Mahayana. Il a dit que toute raison qu’on pourrait invoquer pour réfuter ou tenter de réfuter le fait que les enseignements du Mahayana sont d’authentiques paroles du Bouddha, on pourrait utiliser le même argument pour essayer de prouver que « leurs » textes, les textes du Hinayana, ne sont pas les paroles authentiques du Bouddha car elles aussi reposaient sur la tradition orale et ne furent consignées par écrit que des siècles plus tard. Pareillement, tout argument qu’on pourrait utiliser pour prouver que « leurs » textes sont les paroles authentiques du Bouddha, on pourrait utiliser les mêmes arguments pour prouver que les textes du Mahayana sont des textes émanant du Bouddha. De toute évidence c’est un raisonnement des plus valides. De plus, si nous analysons ce que cela signifie pour un texte d’avoir été enseigné par le Bouddha, alors on doit examiner quel genre d’être est le Bouddha dans les textes du Hinayana. Qui les enseigne ? Quel genre d’être est le bouddha qui dans les textes du Mahayana enseigne ces textes ? Et quel genre de bouddha est le bouddha qui enseigne le véhicule du tantra dans les textes du tantra ? Cela met en lumière trois descriptions très différentes d’un bouddha. 

Le genre de bouddha qui délivre les enseignements du Hinayana est décrit dans les enseignements du Hinayana, alors que dans les soutras du Mahayana il y a une autre description de qui est le bouddha qui enseigne. Et il en existe une troisième dans le tantra. Ce sont trois images très différentes de ce qu’est un bouddha. Donc, le bouddha qui enseigne les écrits du Hinayana est le bouddha historique qui s’illumina dans cette vie sous le nom de Shakyamouni Bouddha. Après son trépas, une fois son passage en parinirvana, c’en était fini pour lui, c’était la fin de son continuum mental. Et donc, quand on dit que les soutras du Mahayana et les tantras du Mahayana furent enseignés par le Bouddha, cela ne veut pas dire nécessairement qu’ils le furent par le Bouddha historique, selon une vision du Bouddha qui le limiterait au seul Bouddha historique, pour être plus précis.

Le bouddha qui enseigne les soutras du Mahayana est quelqu’un qui non seulement s’est manifesté en tant que bouddha historique, mais qui devint illuminé il y a de cela des éons et qui peut se manifester sous des millions d’émanations différentes à toutes les époques, éternellement, au moyen de toutes sortes de formes Nirmanakaya et Sambhogakaya, et enseigner dans des champs de bouddhas, ce genre de choses. Dans le Mahayana, le bouddha ne se limite pas au bouddha historique Shakyamouni. On doit donc ici faire intervenir la coproduction conditionnée pour voir que celui qui enseigne les soutras du Mahayana est le Bouddha décrit dans les soutras du Mahayana et qu’il n’y a pas de contradiction à ce que le Bouddha enseigne le Mahayana, même s’il s’agit du Bouddha apparaissant à une époque différente. Ainsi, on a dans les soutras  – (ceux du Mahayana en tout cas, je ne suis pas sûr si cela apparaît dans les soutras du Hinayana) – le Bouddha inspirant les autres à donner des enseignements, comme dans le Soutra du Cœur, en présence du Bouddha lui-même qui confirme juste à la fin qu’il s’agit là d’enseignements authentiques.

Il existe toutes sortes d’enseignements différents, inclus comme étant les paroles du Bouddha. Cela ne veut pas dire que le Bouddha lui-même a dû les énoncer. Si on regarde la description du Bouddha dans les textes du tantra, on a alors une description plus vaste encore de qui était le Bouddha et ce qu’il est. Ainsi on a le Bouddha en tant que Vajradhara ou Samantabhadra, la pureté primordiale du niveau de conscience le plus subtil dans l’esprit de tout un chacun, etc. Et donc, il n’y a pas de contradiction à ce que le bouddha Vajradhara révèle des enseignements au cours de pures visions et par toutes sortes de moyens à d’autres qui les couchent par écrit, et on a ainsi les tantras. Il n’y a pas de contradiction à ce que quelqu’un puisse obtenir du pur niveau de Dharmakaya du Bouddha – la clarté de l’esprit très subtil, etc. – des enseignements révélés, soit au cours d’une vision pure ou par un autre moyen, car c’est le canal par où les tantras tirent leur origine. Vajradhara l’a dit à quelqu’un d’une certaine manière, habituellement dans une terre pure, et ce dernier l’a consigné par écrit.

Dans certains tantras, on trouve la description suivante : au moment même où le Bouddha enseignait les soutras de la Prajnaparamita au Pic des Vautours, il apparut simultanément dans le sud de l’Inde au stoupa de Dhanyakataka sous l’aspect de Hérouka Chakrasamvara, à quatre faces, et de chacune de ses quatre faces il enseignait en même temps une classe différente de tantra. Tel est le bouddha qui enseigne le tantra, assez différent du bouddha historique Shakyamouni. Tout est donc interdépendant. La sorte de bouddha qui a enseigné chacune de ces classes d’enseignements bouddhiques – Hinayana, Mahayana soutra et Mahayana tantra – doit être mis en relation avec la description du bouddha dans chacun de ces textes.

Pour dire de façon honnête quel est le bouddha qui a enseigné un texte, on doit le faire dépendre de la description qui en est donnée dans ce texte lui-même. Il n’est pas juste de considérer le Bouddha comme existant véritablement – de par son propre pouvoir comme une chose isolée – en tant que bouddha historique enseignant la totalité des différents véhicules. La façon dont on doit concevoir le Bouddha doit dépendre de la description qui en est donnée dans le texte qu’il est en train d’enseigner. On a donc le plus large éventail de compréhension et de description du Bouddha dans les tantras ; et cela comprend, en plus de la description du Bouddha dans les tantras, la description qu’en donne les soutras du Mahayana ; et dans la description du Bouddha qui figure dans les soutras du Mahayana, on devrait inclure le bouddha historique car Bouddha s’est manifesté également sous cette forme. Aussi quand on dit que le Mahayana est un véhicule vaste, il est vaste également en ce qui concerne sa description d’un bouddha, beaucoup plus vaste que la description d’un bouddha qu’on trouverait dans les textes du Hinayana.

Maintenant, quelqu’un a posé la question suivante : « Comment savons-nous qu’un enseignement que quelqu’un affirme avoir reçu au cours d’une pure vision est un enseignement authentique que lui a révélé Vajradhara, Samantabhadra ou qui que ce soit d’autre ? » Sur cette question, les indications sont données assez clairement. L’enseignement au cours d’une vision pure ou l’enseignement d’un terma (gter-ma), un texte révélé qui a été enseveli ou caché, doivent être cohérents avec les principaux points des enseignements bouddhiques, et ne pas aller à leur encontre, en matière de refuge, de renoncement, de bodhichitta, de libération, d’illumination, ces thèmes majeurs du Bouddha. Il en est de même pour l’esprit de bodhichitta, les Quatre Nobles Vérités, le fait que tous les phénomènes conditionnés sont impermanents ainsi que pour les enseignements de base sur la souffrance. Cela doit être cohérent avec ces différents points.

Bien entendu, il peut y avoir de légères différences d’interprétations philosophiques des différents points, mais les thèmes principaux doivent rester cohérents ; et il faut que des pratiquants et des yogis bien qualifiés puissent atteindre les réalisations et les accomplissements exposés dans ces textes en suivant les méthodes qui y sont décrites. Et donc, par inférence, cet enseignement est validé comme un authentique enseignement du Bouddha. S’il comprend tous les principaux thèmes, on en infère qu’il s’agit d’un enseignement du Bouddha, grâce à une cognition valide directe de celles et ceux qui le pratiquent et qui en ont obtenu les réalisations qui y sont décrites. Tels sont les critères.

Il existe un vœu de bodhisattva secondaire qui est similaire, qu’on appelle « l’abandon du Mahayana », et dans ce vœu secondaire on accepte l’idée que le Mahayana fasse partie des authentiques enseignements du Bouddha. Contrairement au vœu-racine, on accepte que les enseignements du Mahayana soient les paroles du Bouddha, mais on critique certains aspects que l’on n’aime pas. Et cela fait référence en particulier à tous les hauts faits accomplis par le Bouddha décrits dans les textes du Mahayana, comme le fait que le Bouddha puisse se multiplier en d’innombrables formes différentes simultanément et se trouver partout au même moment ; que le Bouddha puisse comprendre toutes les langues ; et que, quand il parle, tout le monde puisse le comprendre dans sa propre langue. Et on dit : « C’est ridicule. J’aime le Mahayana, j’aime toute cette idée de la bodhichitta, de l’amour, de la compassion, mais excusez-moi, là ça va trop loin. » Donc si on critique cela, ou si l’on critique les profonds enseignements sur la vacuité – (oh ! vous savez, c’est trop compliqué, qui a besoin de ça ?) – ce genre de chose, il s’agit là du vœu secondaire.

On pourrait les critiquer selon de quatre manières différentes, respectivement. La première raison serait de dire que leur contenu est inférieur, en d’autres termes que les enseignements profèrent des absurdités complètes quand ils disent que le Bouddha peut se démultiplier en tellement de formes différentes. Inférieur veut dire simplement « mauvais, stupide », comme Milarepa qui était capable de rétrécir au point de se loger dans la corne d’un yak. Nous dirions : « C’est ridicule. Il s’agit là d’un enseignement inférieur qui n’est pas destiné à des gens sophistiqués, à la rigueur c’est pour des nomades ou des gens de cette sorte. » C’est très arrogant. La deuxième raison serait de dire que la façon dont ils s’expriment est inférieure – inférieure ici veut dire de basse qualité, de mauvaise qualité, que c’est mal écrit, que la façon dont c’est écrit n’a aucun sens. La troisième serait de dire que l’auteur n’est pas à la hauteur, qu’il est inférieur. Il existe beaucoup de commentaires de ce genre qui disent, bon, cet auteur n’est pas un bon auteur. Enfin, la quatrième raison serait de dire que leur utilité est inférieure, qu’elle n’est d’aucun bénéfice pour personne. Dire que Milarepa a marché à l’intérieur de la pointe d’une corne de yak, cela n’est d’aucune utilité pour personne. Il s’agit là d’un vœu de bodhisattva secondaire. Nous promettons de ne pas y succomber.

En vérité, il est assez commun de briser ce vœu, d’avoir cette attitude comme quoi certains aspects des enseignements sont ridicules, et qu’on cherche juste à les ignorer. Nous voulons seulement les morceaux de choix des enseignements, tandis que ceux que nous n’aimons pas vraiment, comme toutes ces histoires d’enfer et d’éthique sexuelle, nous les ignorons. Les Tibétains ont un dicton : «  Ne soyez pas comme un vieil homme, sans dents pour manger, n’avalant que les pommes de terre bouillies et recrachant la viande. » Autrement dit, on ne prend que les choses faciles à mâcher, tandis que les choses difficiles, on les recrache.

(7) Dépouiller les religieux de leurs robes ou faire en sorte de les leur voler 

Le vœu suivant, le septième vœu de bodhisattva, consiste à chercher à éviter de dépouiller les religieux de leurs robes, comme par exemple de les leur voler. Ici nous commettons un acte qui porte du tort à un, deux, ou trois moines ou nonnes bouddhistes. Rappelons-nous le vœu qui consistait à prendre des offrandes destinées aux Trois Joyaux. Il s’agissait dans ce cas de quatre religieux ou plus. Ici, il s’agit d’une, de deux ou de trois personnes. Peu importe que leur moralité ait dégénérée ou non – comme de ne pas porter leurs robes correctement, vous savez, des choses de ce genre – et peu importe qu’ils étudient ou pratiquent beaucoup ou non. Dans tous les cas, ce à quoi il est fait allusion ici, c’est que par malveillance, on ne les aime pas, on est furieux après eux, on les frappe ou on les agresse verbalement sous le coup de la colère, ou encore on leur confisque leurs biens.

Un exemple moderne serait de confisquer ou de voler la radio de notre voisin(e), moine ou nonne logeant à côté de nous, parce que sa radio perturbe notre méditation. Et donc nous cassons sa radio ou la lui volons. Si un moine ou une nonne a brisé un des quatre vœux majeurs, ils ne sont plus alors moine ou nonne, et sont expulsés du monastère. Nous ne parlons pas de ce cas de figure. Mais s’ils n’ont pas brisé l’un de ces quatre vœux, à savoir les quatre vœux principaux, mais que nous ne les aimons tout simplement pas ou qu’il est difficile de vivre avec eux, etc., le fait de les mettre dehors ou de prendre leurs robes et leur dire qu’ils ne peuvent plus rester là, cela constitue une rupture de vœu. Donc, de toute évidence la question est que nous respections le Sangha religieux et que nous essayions d’aider celles et ceux qui pour le moins ont fait un pas dans la bonne direction en se faisant moine ou nonne, même s’ils ne suivent pas très bien la discipline.

(8) Commettre l’un des cinq crimes haineux

Le huitième vœu de bodhisattva consiste à éviter de commettre l’un de cinq crimes haineux. « Crimes haineux » n’est pas une très bonne traduction, mais il s’agit d’actions extrêmement destructrices qui, sans qu’il y ait d’interruption, immédiatement après la mort, propulsent quelqu’un dans une terrible renaissance. Il s’agit là des actions négatives les plus puissantes comme de tuer son père, tuer sa mère, tuer un arhat (un être libéré), et, armé de mauvaises intentions, faire couler, verser, répandre le sang d’un bouddha. Nous ne parlons pas d’un bouddha faisant un don de sang ou quelque chose de la sorte. Nous parlons d’essayer de blesser un bouddha. Et le cinquième crime est de causer un schisme dans la communauté religieuse du Sangha.

On doit comprendre ce que signifie vraiment créer un schisme dans le Sangha. Cela ne veut pas dire rompre avec notre centre du Dharma et fréquenter un autre centre, ce n’est pas là le problème. Et cela ne fait pas référence au fait de simplement édicter de nouvelles règles de discipline pour les moines et les nonnes. Mais cela se réfère au fait de le faire avec malveillance, au fait de former un autre groupe hors du Sangha bouddhiste et d’être très, très négatif à l’égard du groupe de religieux du Bouddha, et très négatif vis-à-vis du Bouddha, et du Sangha bouddhiste. Cela vient du fait qu’il existe à l’intérieur du bouddhisme l’exemple d’une forme de pratique monastique plus stricte. Elle est composée de treize règles. Le mot sanskrit et pali pour dire cela est « dhutanga », ce qui signifie « branches (règles) de pratiques à observer ou à suivre ». C’est sur la base de ces treize branches qu’on a, par exemple, la tradition « de la forêt » en Thaïlande. Et, dans la tradition tibétaine, certaines de ces règles sont pratiquées par celles et ceux qui accomplissent des retraites de trois ans. Elles furent d’abord proposées par le cousin du Bouddha, Devadatta, qui était tellement négatif à l’égard du Bouddha. Donc, instaurer une tradition qui suit ces treize règles, ce n’est pas créer un schisme dans le Dharma. C’est un schisme quand on le fait en disant que le Sangha du Bouddha ne vaut rien et qu’on le fait avec colère et malice envers le Sangha du Bouddha.

Quelles sont ces treize règles ? (1) La première, nous parlons ici des moines ou des nonnes, est de porter des robes rapiécées, faites de lambeaux de tissus cousus ensemble. (2) Ne porter que trois robes, pas de chandails ou vêtements de cette sorte. (3) Demander l’aumône, autrement dit mendier sa nourriture et ne jamais accepter une invitation pour un repas. (4) La quatrième consiste à n’éviter aucune maison quand on mendie. Parfois, il y a des maisons où on ne vous donne pas de bonne nourriture, ou bien des maisons où on crie après vous, où on est méchant, ce genre de choses, et on pourrait se dire : « Bon, je ne m’arrêterai pas à cette maison aujourd’hui  ». (5) La cinquième consiste à manger en une seule fois, quelle que soit l’aumône qu’on vous fait. Autrement dit, vous ne mettez pas de la nourriture de côté pour la garder ou la manger plus tard, vous ne la mettez pas dans une boîte en plastique dans votre réfrigérateur afin d’en avoir pour le lendemain au cas où vous en manqueriez. (6) La sixième règle consiste à ne manger que dans son propre bol et (7) à refuser de la nourriture supplémentaire une fois que vous avez commencé à manger. Donc à moins d’avoir un très grand bol à aumône, cela réduit la quantité de nourriture qu’on va avaler. (8) La suivante est de vivre dans la forêt ou la jungle. (9) La neuvième, de vivre sous les arbres. (10) Celle qui suit est de vivre à la belle étoile, pas dans une maison ou un abri. (11) La suivante est de vivre la plupart du temps dans des charniers. Les charniers sont des genres de cimetières où l’on brûle les corps, où on les dépèce et les donne en pâture aux chiens et aux vautours. Être dans ce genre d’endroit est un enseignement sur la mort et l’impermanence bien plus puissant que d’être dans un cimetière, lequel est un parc agréable avec des fleurs, des buissons, des arbres et des bancs, et seulement des pierres tombales artistement taillées. (12) La règle suivante est de se satisfaire de n’importe quel endroit où l’on fait halte tout en continuant à errer de lieu en lieu. On ne reste donc pas juste à un endroit, un arbre plaisant qu’on aurait trouvé pour vivre dessous. On bouge de place en place. (13) Enfin, la dernière règle – celle qu’on suit au cours de la retraite de trois ans – consiste à dormir dans la position assise, jamais allongée, donc de dormir en position de méditation.

À dire vrai, Serkong Rinpotché m’a raconté qu’au Collège tantrique du Bas où il était, au Tibet, ils devaient dormir de cette façon en position assise dans le grand hall du temple, tous assis les uns à côté des autres en rangs groupés. Aussi quand la cloche sonnait pour les réveiller, tout ce qu’ils avaient à faire c’était d’ouvrir les yeux et de commencer leurs prières et leur méditation. Et il me disait que les moines avaient l’habitude de dormir en s’appuyant les uns sur les autres, reposant leur tête sur l’épaule du voisin. De toute évidence, c’était une discipline incroyablement difficile. Si vous êtes assis et que vous n’avez pas quelque chose comme un mur pour vous adosser, naturellement vous allez tomber à la renverse. Comme il n’y avait pas de place, ils s’appuyaient les uns sur les autres.

Suivre ce genre de discipline qu’on trouve dans la tradition de la forêt – j’ignore s’ils la suivent de manière absolument stricte dans son intégralité – mais comme une section spéciale au sein du Sangha monastique, cela ne pose pas de problème. Le problème, vous savez, c’est de dire : « Ah, ces autres moines ne sont pas bons, etc… », et de tenir ce genre de propos. Voilà, c’est ça qui cause une fracture ou un schisme dans le Sangha.

(9) Entretenir des vues erronées et hostiles

Le vœu suivant, le neuvième, consiste à entretenir des vues erronées et hostiles. Il ne s’agit pas seulement de nier ce qui est vrai et ce qui a de la valeur, comme les lois du karma, comme de prendre une direction sûre dans la vie, c’est-à-dire le refuge (le Bouddha, le Dharma, le Sangha), comme la renaissance, la libération, l’illumination, le fait d’être bon envers les autres, d’aider autrui. Ce n’est pas seulement nier que c’est vrai ou que c’est bénéfique, ou que cela a de la valeur, mais c’est être hostile envers ces choses et chercher à prouver au moyen d’arguments que ce n’est pas bien, que ça ne vaut rien. Il s’agit là d’un état d’esprit ignorant d’une grande étroitesse dans lequel nous sommes très entêtés et cherchons à contredire, en essayant de réfuter à coup d’arguments quelque chose qui est vrai et qui a de la valeur. L’objet de cette attitude doit être une chose qui existe et qui est vraie, et on doit croire pleinement que notre déni de cette chose est correct, tout en voulant vraiment combattre cette vue correcte.

Au sujet de la pensée erronée vindicative, Tsongkhapa donne des détails : elle doit inclure une motivation comprenant cinq autres attitude perturbatrices. On fait référence ici à une façon de penser ; ce qui ne veut pas dire qu’on va au tribunal pour intenter un procès, mais c’est comme si on en avait l’intention, qu’on y pensait. Tout d’abord, on a le cas  d’un aveuglement de ne pas savoir comment tel noble phénomène existe. Nous l’ignorons simplement. Nous sommes aveugle. Nous n’acceptons pas qu’une chose soit vraie. Ensuite, il y a l’esprit de controverse, de contradiction. Cela veut dire éprouver une jouissance perverse à être négatif. « J’aime me battre. C’est très divertissant d’argumenter contre vous. Peu importe ce que vous dites. » Il y a des gens comme ça ; c’est une attitude. Il y a des gens qui aiment tout simplement être négatifs, et qui aiment contredire tout ce que vous dites, n’est-ce pas ? Ils aiment donner aux autres du fil à retordre. La troisième attitude consiste, après avoir analysé de manière catégorique tel phénomène mais d’un point de vue incorrect, à être complètement imprégné et intimement persuadé de notre vision erronée à propos de ce qui est vrai ou de la réalité. Nous sommes donc totalement convaincu, sur la base de notre analyse incorrecte, que notre vue est correcte et nous nous y accrochons obstinément. La quatrième est une totale bassesse, c’est-à dire avoir une attitude mesquine, être méchant en disant qu’il n’y a aucune raison d’être charitable, que cela ne sert à rien d’aider les autres, qu’il n’y a aucun secours à tirer d’une pratique spirituelle, ou toute autre raison de ce genre. La cinquième est d’arborer une attitude têtue : nous cherchons à obtenir le meilleur des autres sans ressentir la moindre once de honte en faisant preuve d’antagonisme et en essayant de réfuter leurs croyances. « Je veux avoir le dessus dans la discussion. » Mettons que nous ayons une discussion. Vous dites par exemple qu’il est bénéfique d’aider les autres, et moi je dis : « Peu m’importe ce que vous dites, je vais argumenter avec vous et chercher à avoir le dernier mot, et en vérité j’éprouve un grand plaisir à dénigrer vos croyances. Et je ne suis pas le moins du monde honteux du fait que j’essaie de détruire votre croyance en une chose positive, et je pense qu’il n’y a rien de mal à cela, en réalité c’est très amusant. » C’est penser de façon erronée et hostile. Donc quand vous entendez qu’on traduit habituellement cela par « vue fausse », s’il vous plaît comprenez que c’est beaucoup plus complexe que d’avoir juste une compréhension incorrecte d’une chose. Parmi toutes les opinions, celle-ci est un acte négatif très, très lourd.

(10) Détruire des lieux tels que des villes

Le vœu suivant, le dixième, consiste à détruire des lieux, une ville par exemple. Fondamentalement, cela revient à endommager l’environnement d’une cité, d’un village, d’une région à la campagne, ou à jeter une bombe dessus et à les détruire. C’est faire en sorte de rendre un endroit dangereux, ou difficile, ou malsain, pour y vivre, tant pour les humains que pour les animaux. De toute évidence, nous cherchons à pourvoir au bien-être des autres en le leur procurant, et non à détruire les endroits où ils vivent. Nous voulons leur fournir des maisons, nous cherchons à tout donner aux autres. Nous ne voulons pas détruire les lieux où ils vivent.

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