Conseils concernant les pratiques préliminaires ngondros

Introduction

Le mot tibétain « ngondro » (sngon-'gro) est généralement traduit par « pratiques préliminaires », mais Tsenshap Serkong Rimpotché, l'un de mes maîtres principaux, a toujours insisté sur le fait que ce n'était pas tout à fait le sens essentiel du mot. Bien qu'il signifie littéralement « aller avant », c'est-à-dire quelque chose qui précède une autre chose et qui mène à ce qui vient ensuite, la connotation première du mot est « préparation ». Si vous envisagez de traverser le Tibet en caravane, vous devez vous préparer avant de partir. Vous devez rassembler tous vos bagages et les charger sur les bêtes de somme. Il est impossible de faire le voyage sans une bonne préparation. De même, pour continuer à avancer chaque jour après s'être arrêté pour se reposer la nuit, il faut recharger les animaux. Chaque jour nécessite une préparation avant d'aller plus loin sur la piste.

C'est l'idée principale de ces pratiques ngondros. Elles sont absolument nécessaires pour entreprendre et soutenir notre cheminement spirituel. Si nous les concevons comme des préliminaires, nous pourrions penser qu’il n’est pas nécessaire de les faire, et se dire : « Je n'ai pas besoin de pratiques préliminaires, je veux juste aller à l’essentiel. » Mais si nous comprenons que ces pratiques nous préparent au voyage et qu'ils nous donnent l'énergie nécessaire pour le mener à bien, nous serons plus enthousiastes pour les faire et les apprécierons.

Façons de pratiquer les ngondros

La manière dont les pratiques ngondros nous préparent à notre « voyage spirituel » est qu'elles accumulent de la force ou de l’énergie positive et qu'elles éliminent la force ou les potentiels négatifs. Après tout, depuis des temps sans commencement, nous avons pris l'habitude de penser et d'agir sur la base de l'ignorance et de l’inconscience de la réalité. Nous avons ainsi accumulé une énorme force négative qui nous pousse inconsciemment à continuer à agir de manière compulsive de la sorte. Il faudra un effort immense pour surmonter et finalement éliminer ces habitudes innées et en développer des positives. Les centaines de milliers de répétitions que nous faisons avec les pratiques ngondros sont un bon moyen de commencer. Bien que 100 000 répétitions de quelque chose de positif soient minuscules par rapport à des vies entières passées à répéter des schémas négatifs, les pratiques ngondros sont un moyen pour commencer à développer de nouvelles voies neuronales dans notre esprit.

Il existe deux façons d'effectuer les pratiques ngondros : en tant que préparation au début de nos études et de notre pratique du bouddhisme, ou pour stimuler ces deux et les améliorer en cours de route. Bien sûr, nous pouvons également faire les deux.

(1) Dans de nombreuses traditions tibétaines, les maîtres demandent aux nouveaux étudiants de faire un ngondro dès le début. Si les nouveaux venus acceptent de le faire, c'est généralement parce qu'ils sont venus voir le maître pour qu’il les aide à surmonter certaines difficultés de la vie. Parce qu'ils ont foi et confiance en le maître spirituel, ils suivent son conseil de faire un ngondro. La pratique du ngondro met à l'épreuve leur engagement et développe leur discipline et leur persévérance.

L'objectif est d'aider les étudiants à surmonter les blocages mentaux qu'ils peuvent avoir afin qu’ils soient plus réceptifs aux étapes ultérieures de leur formation. Ces étapes ultérieures sont plus précisément la pratique du tantra. Bien que les nouveaux étudiants puissent recevoir quelques enseignements fondamentaux sur les soutras en cours de route, la principale instruction qu'ils reçoivent pour leur ngondro concerne les détails des visualisations et du rituel tantriques. Au cours de leur ngondro, les étudiants développent les états d'esprit et la motivation qui vont de pair avec les pratiques physiques et verbales. Cependant, l’objectif principal semble être de faire les 100 000 prosternations et autres, et de passer ensuite au tantra.

(2) Dans la tradition Guélougpa, les pratiques ngondros sont effectuées en cours de route, et non comme point de départ de la pratique bouddhique. Elles ont pour objectif d’améliorer à la fois la pratique du soutra et du tantra. L'accent est mis sur l'apprentissage et le développement des états d'esprit qui accompagneront les répétitions physiques et verbales, ainsi que sur le développement d'une motivation sincère pour les pratiques. Les étudiants intègrent ensuite les pratiques au cours de leurs études et s'y adonnent sur les conseils de leur maître ou de leur propre initiative, afin de renforcer leur motivation et leur compréhension.

Quelle que soit la méthode, le principal danger à éviter est que les pratiques deviennent mécaniques, qu'il ne se passe rien dans notre esprit pendant que nous les faisons ou que nous adoptions une attitude négative à l'égard de ces pratiques. Cependant, lorsqu'elles sont appliquées correctement, les deux méthodes sont tout aussi efficaces l'une que l'autre. Nous pouvons le constater à partir d'exemples classiques.

L'exemple de Milarépa

Le grand yogi Kagyou, Milarépa, avait accumulé un énorme potentiel négatif au début de sa vie, en pratiquant la magie noire et d'autres pratiques pour se venger de proches qui l'avaient trompé, lui et sa famille. Il est évident qu'il avait beaucoup d'obstacles à surmonter pour réussir dans l'enseignement. En guise de ngondro, son maître Marpa ne lui a pas dit de faire « 100 000 répétitions de ceci et 100 000 de cela », mais lui a demandé de construire des tours de pierre. C'était un travail extrêmement difficile, mais Milarépa regrettait beaucoup ce qu'il avait fait dans le passé et souhaitait sincèrement pouvoir, d'une manière ou d'une autre, se racheter et suivre la voie bouddhique. Milarépa avait donc une forte motivation positive pour accomplir ce dur labeur que Marpa avait spécifiquement conçu pour lui comme une préparation, avant qu'il ne lui donne des initiations tantriques. Marpa ne céda pas tant qu'il ne sentit pas que Milarépa avait brûlé suffisamment de forces karmiques négatives. Après que Milarépa eut achevé la tour, il lui dit : « Ce n'est pas bon, démolis-la et construis-en une autre ! »

L'exemple de Tsongkhapa

Un exemple classique d’un autre style de ngondro est celui de Tsongkhapa, le fondateur de la tradition Guéloug. Tsongkhapa était doué d’une disposition naturelle pour le Dharma très forte, qu’il avait acquise dans ses vies antérieures. Lorsqu'il avait une vingtaine d'années, il avait déjà étudié l'intégralité du Kangyour et du Tengyour, à savoir tous les textes traduits des enseignements du Bouddha ainsi que leurs commentaires indiens, et il avait déjà commencé à enseigner, en commençant par l'Abhidharma, les sujets de connaissance particuliers.

À l'âge de 32 ans, il écrivit son premier grand texte, Le Rosaire d'or des excellentes explications (Legs-bshad gser-'phreng), un vaste commentaire sur L’Ornement des réalisations (Skt. Abhisamayalamkara), citant tous les textes du Kangyour et du Tengyour. Ce texte détaille les différentes étapes de la réalisation de la prajnaparamita, la perfection de la sagesse sur la voie de la libération et de l'illumination. Au même âge, il commença également à donner des initiations tantriques, notamment la pratique de Sarasvati, la parèdre de Manjoushri. Il poursuivit également son étude du tantra, en particulier du Kalachakra. Avant de faire des ngondros formels, comme des prosternations, il fit sa première grande retraite tantrique, qui portait sur Chakrasamvara. Au cours de cette retraite, il pratiqua et maîtrisa les six yogas de Naropa et les six yogas de Nigouma.

Ensuite, à l'âge de 34 ans, il étudia de manière intensive les quatre classes de tantra, en particulier le stade de complétude de Gouhyasamaja et de Kalachakra. Ensuite, il approfondit ses études sur les enseignements Madhyamaka portant sur le vide (vacuité) auprès d’un grand lama Karma Kagyou, Lama Umapa. Ce lama avait des visions quotidiennes de Manjoushri, et Tsongkhapa posait à Manjoushri des questions sur le Madhyamaka par son intermédiaire. Tsongkhapa et Lama Umapa ont ensuite effectué ensemble une retraite intensive sur Manjoushri, après quoi Tsongkhapa a commencé à recevoir des instructions directes de Manjoushri lui-même.

À ce moment-là, Tsongkhapa sentait qu'il n'avait toujours pas une compréhension correcte du Madhyamaka et du tantra de Gouhyasamaja, et il demanda donc l'avis de Manjoushri. Ce dernier lui conseilla de faire une longue retraite de pratiques ngondros et qu’alors, il comprendrait pleinement. Tsongkhapa entreprit une retraite de quatre ans avec huit de ses disciples. Ils accomplirent chacun 35 séries de 100 000 prosternations, c’est-à-dire une série pour chacun des 35 bouddhas dits « de confession », ainsi que 18 séries de 100 000 offrandes de mandalas. En outre, chaque jour, ils firent la longue auto-initiation de Yamantaka pour renouveler leurs vœux. Ils étudièrent également l'Avatamsaka Soutra, un énorme soutra décrivant tous les actes des bodhisattvas. C'est l'un des rares soutras traduits du chinois au tibétain, l'original sanskrit ayant été perdu. Tsongkhapa a déclaré que c'était grâce à ce soutra que les enseignements complets sur les activités des bodhisattvas étaient préservés et disponibles. Sans ce soutra, nous ne les aurions plus.

À la fin de cette retraite de quatre ans, Tsongkhapa eut une vision de Maitreya. Lorsqu'il quitta la retraite, il restaura la statue de Maitreya dans le temple de Dzingji Ling. Maitreya sera le prochain Bouddha et, en restaurant la statue, il créa encore plus de force positive en aidant les personnes qui verraient la statue à établir un lien avec Maitreya.

Ensuite, il reprit une retraite de cinq mois avec ces huit disciples pour continuer les préliminaires. Après cela, il fit une retraite sur le stade de complétude du Kalachakra, puis une retraite d'un an sur le Madhyamaka. C'est au cours de cette retraite sur le Madhyamaka qu'il eut finalement une connaissance non conceptuelle du vide, après quoi il révolutionna complètement les enseignements et la manière d’expliquer ce sujet.

L'exemple de Tsongkhapa est très inspirant et très parlant. Tsongkhapa n'était pas un idiot, il était extrêmement intelligent. Il était à la fois l’érudit et le pratiquant le plus instruit et le plus avancé de son époque, sans compter toutes ces retraites tantriques qu’il avait déjà faites. Toutefois, il n'était pas satisfait de sa compréhension du vide et il n'était certainement pas satisfait non plus de la compréhension qu’en avaient les autres. C'est Manjoushri, l'incarnation de la sagesse et de l'intelligence, qui lui a dit que pour parvenir à une compréhension non conceptuelle correcte, il devait faire des pratiques ngondros intensives afin d'accumuler plus de force positive et de se débarrasser de plus de potentiel négatif. C'est le modèle à suivre pour effectuer ces pratiques au cours de vos études et de votre pratique afin d'en améliorer l’efficacité.

J'ai quelque peu suivi le modèle de Tsongkhapa en le modifiant. Lorsque je vivais en Inde et que j'écrivais ou traduisais quelque chose, il m'arrivait d'être bloqué. Mon travail n'avançait pas vraiment. Dans ces moments-là, j'acceptais les invitations que j'avais reçues pour donner des conférences sur le Dharma dans des centres bouddhistes et des universités de différents pays. J'appelais ces tournées des « retraites de bodhichitta », puisque je me déplaçais pour enseigner, partager et essayer d'aider les gens, et ainsi développer une force positive plus importante. Lorsque je revenais en Inde, mon esprit était beaucoup plus clair et je parvenais généralement à surmonter ce qui me bloquait auparavant.

Aujourd'hui aussi, lorsque j'écris ou que je traduis et que je n'arrive pas à trouver l'expression correcte ou à dire quelque chose de manière simple et claire, je m'arrête et je répète les mantras de Manjoushri et de Sarasvati pendant un petit moment, avec des visualisations spéciales. Inévitablement, mon esprit devient plus clair et je suis capable de trouver une solution.

Pratiques ngondros communes et non communes

Il y a deux étapes dans la pratique ngondro. Dans la tradition Nyingma, elles sont appelées « ngondros externes » et « ngondros internes », tandis que d'autres traditions tibétaines spécifient un « ngondro commun » et un « ngondro non commun ». Le terme « commun » signifie qu'il est partagé avec le soutra et la pratique du tantra, tandis que le terme « non commun » signifie qu'il s'agit d'une préparation spécifique à la pratique du tantra. Une façon plus claire de traduire ces termes serait peut-être de parler de pratiques ngondros « partagées » et « non partagées ». Cependant, quel que soit leur nom, de nombreuses pratiques internes et non partagées, telles que le refuge et la bodhichitta, sont communes au soutra et au tantra.

Les pratiques partagées sont essentiellement ce que l'on appelle les enseignements progressifs « lam-rim » dans la tradition Guéloug. Dans la tradition Kagyou, il y a « les quatre pensées qui tournent l’esprit vers le Dharma », qui correspondent aux pratiques des ngondros externes dans la tradition Nyingma. La tradition Sakya parle quant à elle de « s’affranchir des quatre attachements ». Il y a tellement de façons différentes de structurer le même matériel du soutra dans les différentes traditions tibétaines. La tradition avec laquelle nous travaillons n'a pas vraiment d'importance. Certaines peuvent donner plus de détails que d'autres sur certains points, mais fondamentalement, elles sont toutes identiques.

En ce qui concerne les pratiques non partagées, il existe un large éventail de pratiques qui peuvent être effectuées, chaque pratique étant répétée 100 000, 108 000 ou 130 000 fois. Les ngondros Kagyou standards comprennent les prosternations, la récitation du mantra de 100 syllabes de Vajrasattva, les offrandes de mandala et le yoga du maître (gourou-yoga). Chaque tradition de textes du trésor Nyingma (terma) possède son propre ensemble de pratiques ngondros. Les maîtres peuvent cependant modifier les ngondros standards et concevoir des pratiques individuelles pour des étudiants spécifiques. Dans mon cas, Sa Sainteté le Dalaï-Lama m'a demandé de réciter 600 000 mantras d'Avalokiteshvara et 600 000 mantras de Manjoushri au début de mes études du Dharma. Plus tard, de ma propre initiative, j'ai fait 100 000 mantras de Vajrasattva et, avant ma première longue retraite tantrique, Serkong Rimpotché m'a fait faire 100 000 répétitions du verset du gourou-yoga de Tsongkhapa. Chacune de ces pratiques, bien sûr, impliquait non seulement la visualisation, mais aussi la génération des états d'esprit spécifiques qui l’accompagnent.

Personnellement, je pense que le type de pratiques préliminaires que vous faites n'a pas d'importance. La pratique spécifique que vous faites crée un lien étroit avec une lignée spécifique, ce qui est très bénéfique et nécessaire. Cependant, toutes les lignées mènent au même but, l'illumination. En fin de compte, elles se valent toutes. On ne peut pas dire que l'une soit meilleure que l'autre : leur efficacité dépend de votre motivation, de l'état d'esprit qui vous accompagne et de votre niveau de concentration.

De plus, quelle que soit la tradition tibétaine que vous suivez, chaque pratique complète de sadhana tantrique contient une section préparatoire avec les prosternations, l'offrande de mandala, Vajrasattva et le gourou-yoga. Cela indique clairement que nous avons besoin de ces pratiques ngondros essentielles tout au long du chemin.

Les neuf pratiques ngondros non communes dans la tradition Guéloug

Dans la tradition Guéloug, il existe neuf pratiques ngondros traditionnelles non communes, chacune d'entre elles étant répétée 100 000 fois. Bien qu'il y en ait neuf, cela ne signifie pas que tout le monde doive les faire toutes. Votre maître peut vous suggérer de n'en faire que quelques-unes ou de faire autre chose. Les neuf pratiques sont effectuées dans le contexte de la prière qui s’intitule Les centaines de déités de Tushita (Ganden Lhagyama).

(1) Les prosternations. Elles sont effectuées en prenant refuge et en récitant les noms des 35 bouddhas de confession et des 8 bouddhas de médecine. Serkong Rimpotché a dit qu'il suffisait de réciter tous les noms en une seule fois. Il ne s'agit pas de faire une prosternation pour chaque nom. Il suffit de réciter les noms d’une traite et de se prosterner en même temps. Sinon, vous risquez d'être très confus et de vous perdre en essayant de coordonner les prosternations et les noms. Dans d'autres traditions, les prosternations s'accompagnent de la récitation de la prière en sept branches. En fait, il existe de nombreuses variantes de ce que l'on peut réciter pendant les prosternations. Tout bien considéré, je ne pense pas que cela fasse une différence. Vous faites simplement ce qui correspond à la lignée particulière de pratiques ngondros que vous suivez.

(2 & 3) L’offrande de mandala combiné au refuge et à la bodhichitta. Ces deuxième et troisième pratiques ngondros sont effectuées ensemble dans la tradition Guéloug. Vous offrez un mandala en récitant non seulement le verset classique d'offrande de mandala, mais en ajoutant à chaque fois le verset classique pour le refuge et la bodhichitta. Dans d'autres lignées, ces deux pratiques sont effectuées séparément.

(4) L’offrande de bols d’eau. Vous remplissez et offrez 100 000 de ces bols avec de l'eau pure et propre.

(5) Le gourou-yoga. Dans la tradition Guéloug, on récite la louange de Migtséma (dmigs-brtse-ma) que Tsongkhapa a écrite et dédiée à son maître Sakya Rendawa, qui l'a ensuite dédiée à son tour à Tsongkhapa. Que vous fassiez la version de cinq ou de neuf lignes, je ne pense pas que cela fasse une différence. Encore une fois, vous faites ce que votre maître vous recommande.

Il y a tellement de gourou-yogas différents avec tellement de figures différentes. Que vous le fassiez avec Gourou Rimpotché ou Karma Pakshi (le second Karmapa) ou avec Gampopa, Milarépa, Marpa ou Viroupa, là encore, je ne pense pas que cela fasse de différence. Cela vous relie à la lignée particulière de cette figure, mais à un niveau ultime, ce sont tous des bouddhas. Il s'agit d'unir votre corps, votre parole et votre esprit à ceux d'un bouddha représenté par le gourou de la lignée, tout en conservant votre individualité.

Si vous souhaitez pratiquer le gourou-yoga en visualisant ou en imaginant le gourou sous la forme d'un maître de lignée, il est très utile que vous connaissiez l'histoire de la vie de ce maître et que vous la trouviez inspirante. Il faut que ce soit une source d’inspiration pour vous. Si ce n'est pas le cas, cela ne sera pas très efficace.

(6) Le mantra de 100 syllabes de Vajrasattva. Il existe différentes formes de Vajrasattva, seul ou avec une parèdre. En ce qui concerne le mantra lui-même, il y a la version classique tirée du tantra de Gouhyasamaja, mais il y a aussi des versions de Yamantaka, de Hérouka et de Padma. Dans chacune de ces variantes, quelques mots sont remplacés. Parfois, l'ordre de certaines lignes est inversé. Au final, la version que vous récitez n'a pas d'importance. Celle qui est recommandée par votre maître et pratiquée dans votre lignée convient parfaitement. Elles sont toutes efficaces. Dans le bouddhisme, il existe de très nombreuses variantes de presque tout.

(7) Le mantra de Samayavajra. Samayavajra (Dam-tshig rdo-rje) est une forme d'Amoghasiddhi issue du tantra de Gouhyasamaja. La répétition de son mantra purifie toute rupture du lien étroit (dam-tsig, samaya) qui vous unit à votre maître.

(8) Les statuettes votives « tsa-tsas ». Les tsa-tsas sont de petites statues en argile représentant diverses figures-de-bouddha que l'on fabrique à l'aide d'un moule. Au Tibet, il était facile de construire des petits sanctuaires contenant 100 000 de ces statuettes, car il y avait beaucoup d’espace. En Occident, c'est plus difficile. Je crois que c'est Lama Zopa qui a eu l'idée d'utiliser des bacs à glaçons pour en faire des moules. Vous préparez les tsa-tsas avec de l'eau et vous les congelez en série. Ensuite, vous les laissez fondre et vous remplissez à nouveau les bacs. En fabriquant des tsa-tsas, on accumule des causes pour atteindre le corps physique d'un bouddha.

(9) Les offrandes brûlées de Vajradaka. Les gens connaissent parfois cette figure sous le nom tibétain de Dorjé Khadro (Za-byed mkha'-'gro). Il s'agit d'une pratique similaire à celle de Vajrasattva, qui consiste à brûler les potentiels négatifs. Pour ce faire, vous récitez un mantra tout en offrant des graines de sésame dans un brûleur contenant des charbons ardents. Il s'agit d'un processus beaucoup plus graphique et physique pour imaginer la purification.

Façons de pratiquer les ngondros

Comment pratique-t-on ces ngondros ? Dans certaines traditions, en particulier celles où vous faites un ngondro au début de votre pratique du Dharma, vous faites tous ces préliminaires à la suite les uns des autres. C'est la même chose si vous allez faire une retraite de trois ans. Dans certaines traditions, la première partie de la retraite de trois ans consiste à faire le ngondro une fois de plus.

Certaines personnes peuvent faire ces pratiques toute la journée. Par exemple, à Bodh Gaya ou à Boudanath, vous verrez des Tibétains faire 100 000 prosternations au rythme de 3 000 par jour. Pour la plupart d'entre nous, ce serait presque impossible. Mais vous pouvez aussi vous contenter d'une quantité plus modeste chaque jour, soit en quatre sessions par jour, soit une session le matin et une le soir, soit une seule fois par jour. Quelle que soit la manière dont vous le faites, il est très important de ne faire que trois récitations pour la première session du premier jour, et pas plus. Ce nombre devient alors la quantité minimale que vous devrez faire chaque jour. Ainsi, si vous êtes malade ou si vous voyagez, vous vous arrangez pour le faire. C'est la même instruction pour la retraite d'une déité : ne faites que trois récitations de mantra la première fois. Serkong Rimpotché a beaucoup insisté sur ce point, parce que les gens tombent malades et que c'est difficile. Il ne faut pas rompre la continuité. Si vous rompez la continuité, vous devez tout recommencer. Et si vous le faites correctement, vous devez pratiquer au même endroit, sur le même siège, tous les jours.

Il y a parfois des exceptions. Voici ce qu’une fois j’ai vécu : je faisais une retraite à Dharamsala et on m'a demandé d'aller à Manali pour traduire une initiation et des enseignements que Sa Sainteté le Dalaï-Lama donnait. J'hésitais à interrompre ma retraite et à m'y rendre, mais Serkong Rimpotché m'a réprimandé en disant : « Bien sûr que tu y vas. Ne te pose pas de questions et ne doute pas un seul instant. Fais le minimum chaque jour, puis reviens et termine ta retraite. » C'est le genre d'exception qui est acceptable. Et 100 000, ce n'est pas tant que ça, si on y réfléchit bien. Comme Vajrasattva, j'ai fait 300 répétitions du mantra par jour pendant un an, ce qui fait 100 000. Ce n'est pas si horrible et difficile de faire 300 fois quelque chose en une journée.

Comment éviter de devenir machinal

Le principal facteur qui empêchera ces pratiques ngondros de devenir mécaniques est d'avoir la bonne motivation pour les faire, à savoir le refuge et la bodhichitta. En outre, nous devons mesurer quand faire une courte pause et ne pas trop forcer pendant une session. Plus notre compréhension de ce que nous faisons et de la raison pour laquelle nous le faisons est forte, et plus nous réaffirmons cela avant de commencer une session, et moins nous aurons de problèmes à l'accomplir. Il ne s'agira plus de se dire « je le fais parce que mon maître m'a dit de le faire et que je veux être un bon garçon ou une bonne fille et que je veux que mon maître m’aime » ou « je veux en finir avec cette partie pénible », un peu comme une taxe fâcheuse que nous devons payer afin d'accéder aux bonnes choses qui s’ensuivront, comme la pratique du tantra.

Pratiquer en groupe

Un dernier point. Certaines personnes pratiquent le ngondro dans le cadre d'une retraite en groupe. Il ne s'agit pas d'une méthode traditionnelle, mais d'une méthode qui a été développée spécialement pour les Occidentaux. De nombreuses personnes font les 100 000 prosternations autour du stoupa de Bodh Gaya, mais elles ne font pas partie d’un groupe guidé par une même personne, comme c’est le cas dans les retraites en groupes pour les Occidentaux. Chacun se prosterne individuellement, à son propre rythme.

Le principal avantage d'une retraite ou d'une activité de groupe, qu’il s'agisse du ngondro, de la pratique d'une déité ou de la méditation sur le lam-rim, est qu'elle vous donne de la discipline. Si vous n'aviez pas le groupe pour le faire et la pression du groupe, vous ne le feriez pas. C'est comme aller dans un club de fitness et travailler avec un coach sportif. Vous faites des exercices rigoureux pendant une heure parce qu'il s'agit soit d'un cours, soit d'un travail individuel avec l'entraîneur, et c'est ainsi que les choses se passent. La plupart d’entre nous ne le feraient jamais seul. Ainsi, vous bénéficiez de l'avantage de travailler en groupe. Même les personnes qui s'entraînent seules avec des poids et des machines ne le feraient pas chez elles. Elles ont besoin d'aller dans un endroit et dans une atmosphère spécifique où d'autres personnes le font aussi, et elles acquièrent alors la discipline nécessaire pour s’y adonner. Si cela peut vous aider, c’est très bien.

L'inconvénient de ces pratiques de groupe est que vous n'allez pas à votre propre rythme. Soit le groupe va trop vite, soit il va trop lentement pour vous, ce qui peut vous agacer. Pour certaines personnes, il est préférable de choisir son propre rythme. Ainsi, elles se sentent à l'aise avec ce qu'elles font. Donc, si vous faites une retraite en groupe, veillez à éviter la frustration et l'hostilité qui se manifestent si le rythme du groupe est différent de celle qui vous convient.

Conclusion

Il s'agit d'une petite introduction aux pratiques ngondros, c'est-à-dire aux pratiques que nous faisons pour nous préparer à l'étape suivante.

Il est utile de considérer l'ensemble du chemin spirituel comme une grande aventure. Bien sûr, ce sera difficile — si vous partez en caravane et traversez le Tibet, ce sera difficile — mais c'est une aventure qui en vaut la peine. Le chemin sera semé d'embûches. Mais si nous nous préparons avec ces pratiques ngondros, et si nous redonnons de la vitalité à notre pratique grâce à elles de temps en temps en cours de route, nous finirons par atteindre nos objectifs.

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