Tout le monde peut devenir un bouddha

06:26
Nous sommes tous en quête d’un bonheur durable, alors quoi de plus raisonnable et de plus logique que de poursuivre ce but avec réalisme ? Quoique les biens matériels puissent nous procurer un certain bonheur, la véritable source du bonheur se trouve dans notre esprit. Quand nous avons pleinement développé toutes nos capacités et surmonté tous nos défauts, nous devenons un bouddha, une source de bonheur non seulement pour nous-mêmes, mais aussi pour les autres. Nous pouvons tous devenir des bouddhas car nous possédons tous en nous les facteurs complets de fonctionnement qui nous permettront d’atteindre ce but. Nous possédons tous la nature de bouddha.

Le Bouddha insistait sur le fait que tout le monde peut devenir un bouddha : mais qu’est-ce qu’un bouddha ? Un bouddha est quelqu’un qui a corrigé tous ses défauts, éliminé toutes ses lacunes et réalisé toutes ses potentialités. Au début, tous les bouddhas étaient comme nous : des personnes ordinaires qui faisaient l’expérience de difficultés récurrentes dans leur vie quotidienne à cause de leur confusion sur la réalité et de leurs projections irréalistes. Puis ils se sont rendu compte que leurs projections tenaces, en fait, ne correspondaient pas à la réalité ; alors, avec la forte détermination de se libérer de leurs problèmes et de leurs souffrances, ils ont fini par ne plus croire automatiquement aux fantasmagories projetées par leur esprit. Ils ont cessé d’éprouver des émotions perturbatrices et d’agir de manière compulsive, se libérant ainsi de tous les maux.

Ce faisant, ils se sont employés à fortifier leurs émotions positives – comme l’amour et la compassion – et à aider les autres autant qu’ils le pouvaient. Ils ont développé la même sorte d’amour qu’une mère éprouve pour son enfant unique, mais pour tout le monde. Dynamisés par cet amour et cette compassion intenses pour tous les êtres et par leur résolution extraordinaire de les aider, leur compréhension de la réalité est devenue de plus en plus profonde et puissante au point que leur esprit cessa même de projeter l’apparence illusoire que les choses et les personnes existent par elles-mêmes, séparées de tout le reste, et qu’ils virent directement et clairement l’interconnexion et l’interdépendance de tout ce qui existe.

À travers cette réalisation, ils ont atteint l’illumination : ils sont devenus des bouddhas. Dès lors, leur corps, leur aptitude à communiquer et leur esprit sont devenus libres de toute limitation. Connaissant les effets qu’un certain enseignement aurait sur une personne en particulier, ils sont devenus capables d’aider tous les êtres de la manière la plus habile qui soit. Mais même un bouddha n’est pas tout puissant. Un bouddha ne peut avoir une influence positive que sur ceux et celles qui sont ouverts et réceptifs à leurs conseils, et qui les suivent correctement.

Le Bouddha affirmait aussi que tout le monde peut accomplir ce qu’il a accompli : tout le monde peut devenir un bouddha, même nous. Cela parce que nous avons tous la « nature de bouddha » – l’équipement de travail essentiel qui rend possible la bouddhéité.

Les neurosciences parlent de plasticité neuronale ou cérébrale – la capacité du cerveau à changer et à créer de nouvelles voies neuronales tout au long de la vie. Par exemple, si la partie du cerveau qui dirige notre main droite devient paralysée, un entraînement de physiothérapie peut déclencher un processus de développement de nouvelles voies neuronales dans le cerveau, nous permettant d’utiliser la main gauche. De récentes études ont démontré que la méditation aussi – par exemple, la méditation sur la compassion – peut créer de nouvelles voies neuronales qui accroissent le bonheur et la sérénité d’esprit. Ainsi, de même que nous parlons de la plasticité du cerveau, nous pouvons parler de la plasticité de l’esprit. Le fait que notre esprit et, par conséquent, les traits de notre personnalité soient dénués d’un état statique et figé et puissent être stimulés pour développer de nouvelles voies positives, est le facteur crucial qui nous permet à tous de devenir des bouddhas illuminés.

Au niveau physiologique, chaque fois que nous faisons, disons ou pensons quelque chose de constructif, nous renforçons une voie neuronale positive qui va faciliter et favoriser la répétition de l’action. Au niveau mental, le bouddhisme parle d’accumuler des forces et des potentialités positives. Plus nous renforçons ce réseau de force positive, en particulier en nous rendant utile aux autres, plus il devient robuste. La force positive déployée pour épanouir pleinement nos capacités d’aider tous les êtres en tant que bouddha n’est autre que l’énergie qui nous permettra d’atteindre le but consistant à aider tous les êtres à l’échelle universelle.

De la même façon, plus nous nous focalisons sur l’absence de toute chose réelle qui correspondrait à nos fausses projections de la réalité, plus nous affaiblissons les voies neuronales qui font que nous croyons d’abord à toute cette absurdité mentale, et que nous la projetons ensuite. Peu à peu notre esprit se libère de ces voies neuronales et mentales qui provoquent la confusion, ainsi que des voies créées par les émotions destructrices et par les schémas comportementaux compulsifs qui en dépendent. À leur place, nous construisons de robustes voies de profonde conscience de la réalité. Quand ces voies sont dynamisées par l’énergie de la poursuite du but d’obtenir l’esprit omniscient d’un bouddha qui sait comment aider individuellement tous les êtres limités de la meilleure manière qui soit, ce réseau de conscience profonde permet de réaliser l’esprit d’un bouddha.

Du fait que nous avons tous un corps, les moyens de communiquer avec autrui – comme la parole – et un esprit, nous avons tous le matériel de travail pour réaliser le corps, la parole et l’esprit d’un bouddha, car ces trois outils sont des facteurs de la nature de bouddha. De plus, nous avons tous des qualités positives d’un certain niveau – un instinct de conservation personnelle, de conservation de l’espèce, un instinct maternel ou un instinct paternel, et ainsi de suite – ainsi que la capacité d’agir et d’influencer autrui. Ces qualités sont aussi des facteurs de la nature de bouddha, lesquels font partie de notre équipement de travail pour cultiver les qualités positives telles que l’amour et l’affection illimités et pour poursuivre les activités illuminantes d’un bouddha.

Quand nous observons comment marche notre esprit, nous découvrons encore d’autres facteurs de la nature de bouddha. Nous sommes tous capables d’assimiler des informations, de regrouper des objets qui ont des traits communs, de reconnaître le caractère individuel des choses, de réagir à ce que nous percevons et de connaître des choses. Ces diverses façons dont notre activité mentale fonctionne sont limitées pour le moment, mais elles font aussi partie de nos outils pour réaliser l’esprit d’un bouddha, lesquels, à ce moment-là, fonctionneront au maximum de leurs potentialités.


Vidéo : Matthieu Ricard — « Esprit humain ou esprit animal ? »
Pour afficher les sous-titres : cliquez sur l’icône des sous-titres en bas à droite de l’écran de la vidéo. Pour changer de langue, cliquez sur l’icône « Paramètres » puis « Sous-titres » et sélectionnez votre langue.

Résumé

Étant donné que nous possédons tous l’équipement de travail pour devenir un bouddha, atteindre l’illumination n’est qu’une question de motivation et de travail continu et ardu. Le progrès n’est jamais linéaire : certains jours iront mieux que d’autres, le chemin de la bouddhéité est long et escarpé. Mais plus nous nous souviendrons de nos facteurs de la nature de bouddha, plus nous éviterons le découragement. Il suffit de garder à l’esprit qu’il n’y a rien en nous qui « cloche » de manière intrinsèque ou inhérente. Nous pouvons surmonter tous les obstacles avec une motivation positive et suffisamment forte et avec des méthodes réalistes qui associent habilement la compassion et la sagesse.

Top