Le renoncement, le chérissement de soi et le chérissement des autres

Introduction générale et vue d'ensemble

Les enseignements sont d'une portée infinie et s'adressent à des êtres aux dispositions qui le sont tout autant. Ils peuvent tous être regroupés dans trois véhicules de l’esprit : le Hinayana, le soutra Mahayana et le tantra Mahayana. Tous ces véhicules de l'esprit et leurs enseignements ont été préservés au Tibet. On y distingue deux lignées de transmission : celle de l’ancienne traduction, la tradition Nyingma, et celle de la nouvelle traduction, la tradition Sarma. Au sein de la tradition Sarma de la nouvelle traduction, on retrouve les traditions Sakya, Kagyou et Kadam. La tradition Kadam, fondée par Atisha, est devenue plus tard la tradition Guéloug.

La tradition Kadam a été fortement influencée par les différents enseignements sur la bodhichitta. La tradition Guéloug qui lui a succédé s'est donc spécialisée dans la transmission de tous les vastes enseignements sur ce sujet, provenant directement de la lignée du grand Nagarjuna et de ses descendants spirituels de l'Inde.

Comme nous l'avons dit, il est extrêmement important que notre esprit et tout ce qui est en nous soient totalement cohérents avec les enseignements. Ceux-ci ne doivent pas seulement être de belles paroles. Ils doivent être intégrés à notre esprit, en harmonie avec la disposition de chaque pratiquant. Il est très important de ne pas tomber dans les extrêmes de la partialité, en pensant qu'une seule des traditions bouddhiques détient les vrais enseignements. Comme l'a dit le grand IVe Panchen-Lama, Losang Chokyi Gyaltsen, dans Un texte racine pour le mahamoudra (Phyag-chen rtsa-ba) : « Du point de vue des noms qui leur ont été attribués individuellement, il existe de nombreuses traditions. Néanmoins, lorsqu'elles sont examinées de près par un yogi, instruit dans les Écritures et la logique, et expérimentées (dans la méditation), leurs significations définitives sont toutes perçues comme aboutissant au même but. » Il est donc extrêmement important d'aborder les enseignements de manière impartiale et sans préjugés.

Nous avons commencé l’étude d’un texte de Namkapel, disciple du grand Tsongkhapa, intitulé LEntraînement de l'esprit pareil aux rayons du soleil, un commentaire sur LEntraînement de l'esprit en sept points de Guéshé Chekawa. Les sept points sont les suivants :

  • Les préliminaires
  • La méthode d’entraînement aux deux bodhichittas, relative et profonde
  • Transformer les circonstances adverses en voie d’illumination
  • Condenser la pratique en une seule vie
  • La mesure d’avoir entraîné nos attitudes
  • Les pratiques étroites pour l’entraînement de l’esprit
  • Les points à exercer pour l’entraînement de l’esprit

Accomplissement des préliminaires

Jusqu'à présent, nous avons abordé les préliminaires. En nous engageant de tout cœur auprès d'un mentor spirituel, comme nous l'avons expliqué précédemment, nous nous entraînons aux différents points de la voie progressive. En pensant à la précieuse vie humaine, nous devons reconnaître toutes les nombreuses libertés ou répits dont nous disposons, ainsi que toutes nos richesses. Après les avoir reconnues, nous pouvons les utiliser judicieusement. En effet, une fois que nous apprécions ce que nous avons, nous voulons naturellement en tirer profit.

Le fait de penser à la facilité avec laquelle nous pouvons perdre cette opportunité nous fait prendre conscience de l’impermanence et de la mort. Nous prenons conscience qu'à l'exception du Dharma et des diverses mesures préventives que nous avons mises en place dans notre continuum mental, rien ne nous aidera au moment de la mort. Afin d'intégrer réellement les différentes mesures et pratiques spirituelles dans notre esprit, nous devons avoir cette conscience de la mort. Sinon, nos efforts ne seront pas pleinement fondés. En regardant les grands maîtres du passé du Tibet et de l'Inde, et également les nombreux pratiquants actuels qui consacrent leur vie entière à la pratique - certains à Mysore, d'autres dans les grottes ici à Dharamsala, au Ladakh et dans divers endroits en Inde - aucun n'a atteint l'immortalité, aucun ne vivra éternellement.

Quelle que soit la situation dans laquelle nous nous trouvons, il est extrêmement important de l’envisager de la meilleure manière afin d’en faire un moyen de progression spirituelle le plus vaste possible. Nous pourrions par exemple penser aux différentes communautés (Sangha ou autre) que nous pourrions rejoindre, mais quel que soit le niveau auquel nous nous engageons, il est important de tourner tout notre esprit et notre cœur vers les enseignements. Il est extrêmement important que les laïcs soient eux aussi cultivés et bien formés. Ceci est valable quel que soit notre point de vue d’analyse. En effet, quelqu’un d'arrogant et de prétentieux, qui exploite les autres et en profite, provoque des réactions de mépris et de malaise chez tout le monde. Même si nous ne sommes pas particulièrement religieux, il est donc extrêmement important de faire des efforts pour être une bonne personne. Et si nous devenons une personne spirituelle, nous ne penserons alors pas exclusivement à notre vie actuelle, mais à toutes les vies futures et à la manière dont nous pouvons leur être profitables.

Quel que soit le niveau auquel nous travaillons, que ce soit pour cette vie ou pour les vies futures, nous devons consacrer tous nos efforts à nous améliorer, à travailler sur nous-mêmes, à grandir, à devenir une personne meilleure et plus aimable. C'est ainsi que nos vies et la société dans laquelle nous vivons deviendront plus heureuses. Si nous avons travaillé toute notre vie pour devenir une meilleure personne et si nous avons développé divers potentiels positifs, nous n’aurons pas de grands regrets et le sentiment d’avoir gâché notre vie au moment de la mort. Il est très important de travailler sur ce point afin de ne pas éprouver de regrets au moment de mourir, et la meilleure façon de mourir l'esprit tranquille est de développer des potentiels positifs sur notre continuum mental au cours de cette vie. Si nous avons construit de forts potentiels positifs dans cette vie, alors dans les vies futures nous rencontrerons des situations agréables, les choses continueront à s'améliorer et nous pourrons poursuivre notre développement et notre progrès spirituels.

Que nous ayons ou non été en mesure de réaliser l'un des cheminements spirituels de l’esprit tels que les cinq cheminements de l’esprit n’est pas décisif. En effet, si nous avons développé un potentiel positif dans cette vie, nous pourrons mourir avec l'espoir que dans les vies futures, nous réaliserons l'un d’entre eux et deviendrons un être hautement réalisé, un arya.

Le renoncement

Nous avons maintenant atteint le point des préliminaires où est abordé le thème du renoncement, la détermination à se libérer de nos problèmes. Si nous ne pensons pas à tous les problèmes et à toutes les souffrances liés aux situations incontrôlables du samsara, nous ne pourrons pas développer le renoncement, la détermination à nous libérer de tous ces problèmes. Il est donc extrêmement important de penser à toutes ces situations, de développer un dégoût total à leur égard et, du plus profond de notre cœur, la forte détermination à nous en libérer.

Les textes du Vinaya disent : « Le résultat final de l'élévation est la chute. Le résultat final du rassemblement est la dispersion et l'effondrement. » Telle est la nature de la réalité. Il est inutile de mentionner qu'au cours de nos vies sans fin jusque dans cette vie-ci, nous avons été séparés d’une multitude d’êtres desquels nous étions proches. Quel que soit le type de splendeur dont nous pouvons jouir dans l'existence mondaine, tout cela finira par se désintégrer et s’anéantir. De plus, il semble qu’au cours des vies sans commencement au cours desquelles nous avons pris naissance et sommes morts de manière régulière et répétée, nous en fassions l’expérience toujours complètement seuls. Lorsque nous gardons cela à l'esprit, il devient évident que l'important pour nous est d’accumuler les différents potentiels positifs, en essayant de développer les perfections ou attitudes de grandes portées telles que la discipline éthique, la générosité, et ainsi de suite.

Nous devons réaliser que, quelles que soient les choses périssables que nous possédons, aucune d'entre elles n'est fiable. Nous ne pouvons pas compter sur notre corps car il n'est pas stable. Nous ne pouvons pas non plus nous fier à notre position sociale, pas plus qu’à nos richesses et possessions. Ces choses ne permettent pas d'obtenir la sécurité. Nagarjuna, dans sa Lettre à un ami (bShes-phreng), aborde le sujet des différents types de souffrances ou de problèmes que nous connaissons, tels que la maladie, le vieillissement, la mort, le fait de ne pas obtenir ce que nous voulons, d'obtenir ce que nous ne voulons pas, et ainsi de suite.

Ces points sont abordés en détail dans Le Grand Traité de la voie progressive (Lam-rim chen-mo) de Tsongkhapa, où l’on retrouve, selon les nombreuses présentations possibles, les huit, six et trois types de souffrances. En résumé, une fois que nous sommes nés sous l'influence du karma et des illusions, des impulsions compulsives et des attitudes perturbatrices, il n'y aura que des problèmes et des souffrances. Nous avons en nous toutes les causes qui vont engendrer des problèmes et des souffrances. Les circonstances extérieures peuvent certes aider ces causes à mûrir, mais les causes elles-mêmes sont déjà en nous. Nous faisons donc l'expérience de la souffrance, par exemple les problèmes de la souffrance réelle : notre corps tombe malade, nous nous blessons, nous éprouvons de la douleur, etc.

Lorsque nous y réfléchissons, notre corps humain provient des substances de nos parents, des choses nauséabondes comme le sperme et le sang. En y regardant de près, il n'y a rien qui soit vraiment agréable ou attirant pour l'esprit. En particulier, si nous pensons au corps humain et que nous lui enlevons son revêtement extérieur qu’est la peau, il n'y a absolument rien d'attrayant. Personne ne trouvera l'intérieur du corps particulièrement séduisant.

Cette nature du corps humain, sale et peu attirante, ne vient pas de l'extérieur : elle vient de sa nature même. Si nous trouvions une flaque de sperme et de sang sur le sol, nous ne la trouverions pas franchement attirante ou jolie. Tout le monde trouverait cela plutôt nauséabond et dégoûtant, pourtant ce sont bien les causes ou les substances dont le corps est fait. Il n'y a donc rien d'attrayant dans sa nature réelle. Quant à cette façon incorrecte de considérer le corps comme quelque chose de tellement séduisant, elle agit comme une circonstance pour que toutes les attitudes et impulsions perturbatrices que nous avons sur notre continuum mental s'embrasent, comme l'attachement, l'hostilité et la naïveté. Toutes ces attitudes et impulsions naissent de la saisie de cette masse de substances impures, de son identification à « moi », à « mon corps », etc. Cette identification sert de base à toutes sortes d'attitudes perturbatrices.

Si nous ne faisons pas un usage constructif de notre corps, alors, qu’en est-il du point de vue du corps lui-même ? Tout d'abord, il a causé de l'inconfort à notre mère en le portant dans son ventre, puis de la douleur en le mettant au monde. Ensuite, il a causé des problèmes et des souffrances à toutes celles et ceux qui ont subvenu à ses besoins. Notre corps a causé et continue de causer beaucoup de problèmes et nécessite que l’on s’en occupe, alors, si nous n'en tirons rien de constructif, il n'est vraiment qu'un fauteur de troubles. Et nous renaissons avec ce type de corps depuis des temps immémoriaux.

Prenons un exemple communément utilisé, celui de l'océan du samsara. Un océan est quelque chose d'insondable : nous ne pouvons pas en mesurer la profondeur. Il en va de même lorsque nous pensons à tous les corps humains que nous avons pris et à tous les problèmes qui en ont découlé, en particulier à toutes les souffrances liées à la vieillesse. Quel que soit le type d’entreprise ou d’activité dans lesquelles nous nous sommes engagés, avec le temps nous allons y contribuer avec moins de vigueur, notre esprit va devenir plus déprimé et plus faible, nos sens vont diminuer, notre corps va commencer à s'affaiblir et à se désagréger. Tout le monde fait cette expérience, n'est-ce pas ? Il est très douloureux de vieillir. Et tout le monde connaît les souffrances liées à la maladie. Nous devons subir toutes sortes de traitements médicaux qui sont généralement très coûteux et extrêmement inconfortables. Si l'on considère les choses sous tous ces angles, le corps est un véritable fauteur de troubles : il tombe malade, il vieillit, etc. Peu importe à quel point nous avons exercé notre corps, que nous soyons en forme ou non, il finira par s'effondrer. Nous devons donc réfléchir à tous les problèmes liés à la vieillesse et au fait que nous ne pouvons pas rester en pleine santé éternellement.

Les quatre nobles vérités

L'obtention de la libération est bien l’objectif à atteindre, mais si nous nous disons simplement : « Si je pouvais atteindre la libération, je pourrais enfin me reposer tranquillement ! », cela n'aboutira pas.

Tout le monde souhaite un véritable arrêt, une véritable cessation de tous ces problèmes et difficultés, mais nous ne pouvons pas nous contenter de nous asseoir et de nous attendre à ce qu'ils disparaissent simplement en le souhaitant. Nous devons nous pencher sur les causes de nos problèmes, à savoir tous les agrégats ou facteurs qui se répètent de manière incontrôlée et qui constituent chaque moment de notre expérience. Ces agrégats proviennent de nos attitudes et de nos impulsions perturbatrices, parce que notre esprit est incontrôlé. Il est incontrôlé en raison de notre inconscience (ignorance) et de notre saisie de l'existence dûment établie. Cette saisie est due à notre vision déformée de la réalité.

En considérant les différents types de points de vue de la réalité que nous pouvons avoir, certains sont perturbateurs tandis que d'autres sont valides. Puisque les attitudes perturbatrices sont fondées sur des visions erronées et déformées de la réalité, si nous avons une vision correcte et valide de la réalité, la racine même de la cause de ces attitudes perturbatrices est éliminée. Au fur et à mesure que la vision correcte de la réalité se renforce dans notre esprit, c’est-à-dire au fur et à mesure que nous nous familiarisons avec le fait de toujours considérer les choses du point de vue correct de la réalité, nos points de vue erronés, qui sont entièrement fondés sur l'irréalité, s'affaibliront de plus en plus.

Lorsque nous parvenons à une cessation complète, ou à l'arrêt de la saisie de l’existence dûment établie des choses, qui est une manière impossible d’exister, nous nous débarrassons des voiles qui nous empêchent de voir la nature de l'esprit. Ces voiles sont éphémères, ils ne sont pas la nature fondamentale de l'esprit. Il existe des étapes progressives des véritables cessations de la saisie de l'existence dûment établie. En franchissant les étapes de ces véritables cessations, nous pouvons éliminer tous les voiles éphémères et réaliser la véritable nature de l'esprit. S'il n'y avait rien à faire pour remédier à cette situation, il ne servirait à rien de travailler si dur. Mais puisqu'il est possible de se débarrasser des voiles qui nous causent tant de souffrances et de problèmes, il est tout à fait pertinent de réfléchir aux problèmes récurrents et incontrôlables du samsara. De cette manière, nous pourrons développer une forte détermination à nous en libérer et nous travaillerons réellement pour atteindre la véritable cessation et l'élimination des problèmes.

Examinons les différents types de problèmes et de souffrances : la souffrance de la souffrance, la souffrance du changement et la souffrance omniprésente. Ce troisième type est la souffrance liée aux agrégats omniprésents qui affectent chaque instant de notre expérience. C'est la nature même du corps, associée aux agrégats de notre expérience, que d’apporter des problèmes. Les agrégats de notre expérience sont dus à la force des impulsions ou karma, ainsi qu’aux diverses attitudes perturbatrices qui en découlent. Si nous pouvions nous débarrasser de ces attitudes, nous pourrions nous débarrasser de ces problèmes difficiles résultant des agrégats. C'est donc le troisième type de souffrance, les agrégats accompagnés d'attitudes perturbatrices et d'impulsions, qui sont les principaux fauteurs de troubles, constituant ainsi le samsara. Il nous faut donc bien réfléchir aux inconvénients du samsara, et ce à partir de très nombreux points de vue différents. Si nous pensons qu'une fois ordonné, nous sommes libérés du samsara, alors que si nous avons une famille et des enfants, nous sommes dans le samsara, c'est une attitude complètement erronée.

La deuxième noble vérité, la véritable origine ou cause de tous les problèmes, est constituée par les attitudes et les impulsions perturbatrices, ou karma. En les examinant, nous découvrirons qu'il est en fait possible de s'en débarrasser pour toujours. Il est en effet possible d'avoir de véritables cessations ou arrêts de ces attitudes et, pour y parvenir, nous devons développer de véritables cheminements de l'esprit. Ce sont les points les plus profonds.

La manière la plus profonde de se libérer de tous les problèmes et de la souffrance est de développer un objectif de bodhichitta. Nous pouvons être amenés à développer cet objectif de différentes manières. Ici, nous parlons de le développer uniquement dans le contexte de l'abandon de l'implication compulsive dans cette vie afin de porter notre intérêt aux vies futures. Cela ne signifie pas que nous limitons notre attention à la libération et  nous détournons de l'implication dans les vies futures. Dans ce texte, quelle que soit la réalisation que nous voulons atteindre dans cette vie, nous l’accompagnons immédiatement du désir de développer la bodhichitta. C'est ainsi que l’explique ce texte.

Développer les deux types de bodhichitta

L'importance et les avantages du développement de la bodhichitta

Nous avons ainsi terminé les préliminaires. Le deuxième des sept points concerne la manière de développer la bodhichitta proprement dite. Nous devons développer deux types de bodhichitta : relative et profonde. La bodhichitta relative vise la vérité conventionnelle (relative, superficielle, de surface, apparente) de chacun et de chaque chose, tandis que la bodhichitta profonde vise leur vérité la plus profonde, leur vacuité. Dans ce texte, nous développons d'abord la bodhichitta conventionnelle, puis la bodhichitta profonde. Dans LOrnement des réalisations (mNgon-rtogs rgyan, Skt. Abhisamayalamkara), Maitreya nous dit qu'une personne à l'esprit très vif pourrait développer d'abord une compréhension véritable de la réalité et, sur cette base, développerait ensuite la bodhichitta conventionnelle. Il est parfois plus efficace de développer ou d'engendrer la bodhichitta la plus profonde en premier. En effet, lorsque nous réalisons qu'il est possible et réaliste d'atteindre une véritable cessation en générant la bodhichitta la plus profonde et que nous avons donc la possibilité d'atteindre la libération du samsara et, au-delà, l’illumination, nous pouvons alors vraiment nous intéresser à l'atteinte de l’illumination pour les autres.

[Dans l'édition de Togmé Zangpo du texte racine de Guéshé Chekawa, la bodhichitta la plus profonde est présentée avant la bodhichitta conventionnelle, avec le verset suivant : « Réfléchissez au fait que les phénomènes sont comme un rêve. Discernez la nature fondamentale de la conscience qui ne se manifeste pas. L'adversaire lui-même se libère en son propre lieu. La nature essentielle du chemin est de s'installer dans un état de base qui englobe tout. Entre les séances, agissez comme une personne illusoire. » Dans l'édition de Pabongka, ce verset sur la bodhichitta la plus profonde, précédé de la ligne supplémentaire « Ce qui est caché doit être montré après avoir atteint la stabilité (en cela) » suit immédiatement les versets sur la bodhichitta conventionnelle. Cette ligne supplémentaire n'apparaît pas du tout dans l'édition de Togmé Zangpo. Dans l'édition de Namkapel, ce verset, ainsi que la ligne supplémentaire qui le précède, apparaît à la toute fin du texte.]

Le Mahayana est divisé en deux voies, celle des soutras et celle des tantras. Quelle que soit celle que nous empruntons, le bénéfice de développer la bodhichitta conventionnelle est qu'elle est la porte d'entrée dans le véhicule du Mahayana. Sans un objectif de bodhichitta dans notre continuum mental, nous ne pouvons pas être considérés comme un mahayaniste, quelqu'un qui possède un vaste véhicule d’esprit, et ce, même si nous avons d’autres qualités telles que la compréhension du vide. En revanche, si nous avons un objectif de bodhichitta, alors même si nous n'avons pas d'autres qualités, nous pouvons être considérés comme un enfant spirituel des bouddhas, un mahayaniste possédant un vaste véhicule d’esprit. Le véritable facteur distinctif d'un mahayaniste est donc l'existence d'un objectif de bodhichitta. Nous trouvons cela dans les textes des soutras et des tantras. Dans LEngagement dans la conduite du bodhisattva, Shantideva nous dit que la bodhichitta est la seule porte d'entrée dans le Mahayana. Dans Le Tantra de Vajrapani, il est également dit que la bodhichitta est requise pour que nous soyons qualifiés pour entrer dans le mandala et recevoir la transmission de pouvoir (initiation).

Toutes ces citations nous disent que la bodhichitta est la source de toutes les bonnes qualités. Et vraiment, quand on y regarde de plus près, les bénéfices du développement d'un objectif de bodhichitta sont infinis. Ils sont très bien décrits dans LEngagement dans la conduite du bodhisattva. C'est parce qu'il a développé un cœur bon et chaleureux et, sur cette base, un objectif de bodhichitta pour atteindre l'illumination pour le bénéfice de tous les êtres que le Bouddha Shakyamouni est une personne si précieuse et importante.

Les avantages d'avoir un cœur bon et chaleureux, d’être une bonne personne, sont aussi valables pour les animaux. Si notre chat reste gentiment assis et ronronne, nous lui donnerons de la nourriture et nous serons très gentils avec lui. Mais s’il saute dans tous les sens et se comporte de manière sauvage, griffant et mordant, personne ne sera satisfait d'un tel animal et il risque d'avoir des problèmes pour être nourri. En ce qui concerne les êtres humains, si nous sommes bons et chaleureux, tout nous réussit. Mais si nous sommes très grossiers et mauvais, personne ne voudra être en notre compagnie.

Il est extrêmement important de travailler à développer tous ces états d'esprit positifs : l'amour qui souhaite le bonheur de chacun, la compassion qui souhaite que chacun soit libéré de la souffrance, ainsi qu’un amour chaleureux envers autrui. Si, sur la base de ces états d’esprit, nous avons développé un objectif de bodhichitta dans notre continuum mental, alors rien que sur cette base, nous accumulerons d'abondantes réserves ou réseaux de divers types de force positive. Ainsi, la bodhichitta en elle-même créera des forces variées pour nous protéger et nous débarrasser des obstacles.

Le simple fait de prononcer le mot bodhichitta ou de l'entendre prononcer est profondément positif et instructif. Voilà pour la première partie de cette section, les avantages du développement de la bodhichitta.

La seconde partie explique comment s'entraîner à la bodhichitta conventionnelle, puis à la bodhichitta profonde. La bodhichitta conventionnelle s'adresse à tous les êtres limités, avec l'intention de les aider à se libérer du samsara, avec pour objectif l’obtention de l’éveil. Lorsque nous parlons d’être bénéfiques à tous les êtres, il s'agit de changer notre attitude vis-à-vis de nous-mêmes et des autres. Nous devons donc garder à l'esprit que la bodhichitta est un cœur dont l'intention d’être bénéfique à tous les êtres est si forte qu'elle s'étend à chacun d'entre eux et à l’infini, et dont l'intention d'atteindre l'éveil est si forte qu'elle est pleinement dirigée vers cet objectif.

Les deux méthodes pour développer la bodhichitta conventionnelle

Les méthodes à proprement dites pour développer la bodhichitta conventionnelle sont l'égalisation et l'échange de nos attitudes à l'égard de soi et des autres, ainsi que la méditation en sept points sur les causes et les effets. Ces deux méthodes reposent sur le développement d'un état d'amour chaleureux pour les autres. Ce type d’amour est un sentiment spontané de proximité et de chaleur chaque fois que nous rencontrons quelqu'un : nous le chérissons, nous nous préoccupons profondément de lui et nous nous sentirions mal si quelque chose allait mal pour lui. Selon la méthode des causes et des effets en sept points, pour développer ce type d'amour chaleureux, nous devons d'abord adopter l’équanimité, c’est-à-dire une attitude égale à l'égard d’autrui. Cela signifie que nous ne ressentons ni attachement, ni aversion, ni négligence à l'égard de qui que ce soit. Nous reconnaissons chaque personne comme ayant été notre mère, nous reconnaissons leur gentillesse et nous nous en rappelons, puis, remplis de gratitude et désireux de leur rendre la pareille, nous développons cet amour chaleureux à leur égard.

L’attitude de l’échange de soi avec les autres provient de la tradition de Shantideva. Il n'est pas nécessaire d'insister sur le fait que tout le monde a été notre mère. Il suffit plutôt de penser de manière plus générale au fait que nous voulons tous et toutes être heureux, que personne ne veut souffrir ou avoir de problèmes, exactement comme nous. À cet égard, nous sommes toutes et tous égaux. Nous voyons que le fait de nous chérir nous-mêmes est à l'origine de toutes les difficultés, tandis que le fait de chérir les autres est à l'origine de toutes les bonnes qualités. Nous devons penser : « Puisque je ne veux pas être malheureux et que je veux être heureux, je dois renoncer à me chérir moi-même et je dois développer l'attitude qui consiste à chérir les autres. » Ainsi, sur la base de la réalisation de l'égalité entre soi et autrui, nous développons cet amour chaleureux pour les autres et nous changeons notre attitude à leur égard. Il s'agit d'une méthode très complète. Les deux façons de développer un objectif de bodhichitta, à savoir l'échange de soi avec les autres et la méthode de cause à effet en sept points, nous amènent à avoir de l'amour chaleureux pour les autres.

Selon la disposition d'une personne, développer l'attitude consistant à reconnaître tout le monde comme « ma mère » peut parfois poser des problèmes. Nous pouvons développer cette attitude en nous considérant comme très importants : « Je suis vraiment quelqu'un de très important, et parce que je suis important, ma mère est aussi très importante. » Nous développons alors le sentiment que « je veux aider ma mère parce qu'elle est ma mère », et nous voulons aider tous les êtres « parce qu’ils ont tous été ma mère ». Cette façon de développer la bodhichitta met fortement l'accent sur « moi » et « mien ». C'est sur ce point que réside le danger de cette instruction.

Si, en revanche, nous pensons à échanger notre attitude à l'égard de nous-mêmes et des autres, à vouloir aider les autres non pas simplement parce qu'ils ont été « ma propre mère », mais « parce qu’ils ne veulent pas de problèmes et veulent le bonheur, tout comme moi », il y a beaucoup moins de danger. Nous ne sommes plus impliqués dans des considérations de « moi » et de « mien », et cela devient donc une manière beaucoup plus vaste de tendre la main aux autres et de développer un objectif de bodhichitta. Ainsi, nous ne pensons pas seulement à la bonté des autres lorsqu'ils ont été notre mère, mais nous pensons à la bonté de tout le monde, à la façon dont ils ont toujours été bons avec nous, de toutes les façons. Il s'agit là d’expliquer comment appliquer les deux méthodes ensemble, l’entraînement en sept points sur les causes et les effets ainsi que l'égalisation et l'échange de soi avec autrui.

Les inconvénients du chérissement de soi

[Dans le texte de Namkapel, la ligne « Bannir une chose comme (portant) tout le blâme » de l’édition de Togmé Zangpo du texte de Guéshé Chekawa, est déplacée ici et les désavantages du chérissement de soi sont donnés en commentaire de la ligne. Pabongka suit cet ordre.]

En ce qui concerne l'échange de nos attitudes à l'égard de nous-mêmes et des autres, le texte explique que tous nos problèmes et nos difficultés viennent du fait que nous nous chérissons nous-mêmes, tandis que tous nos bienfaits et notre bonheur viennent du fait de chérir autrui. Le fait que les shravakas et les pratyekabuddhas ne soient pas capables d'atteindre le niveau spirituel le plus élevé, le but spirituel le plus élevé, est dû à leur chérissement de soi. Donc, à partir de là, tous les désavantages, tous les inconvénients que l'on peut connaître sont imputables à l'attitude d'auto-chérissement, c'est-à-dire à l'égoïsme. Très souvent, lorsque les gens sont malheureux, ils veulent pointer un doigt accusateur sur les autres : « Je suis malheureux parce que cette personne a fait ceci ou cela. » En fait, tout notre malheur vient de l'égocentrisme, par lequel nous nous considérons si grands et si importants que nous désignons les autres comme responsables de notre malheur. En vérité, tous nos problèmes et notre malheur proviennent des impulsions destructrices qui naissent de notre propre esprit, autrement dit, du karma et des attitudes perturbatrices.

Il y a deux choses ici : l'attitude du chérissement de soi et la recherche d'un soi réellement existant. Si nous parvenions à comprendre la réalité, à savoir qu'il n'existe pas d'identité dûment établie, nous nous débarrasserions à la fois de la recherche d'un moi réellement existant et de l'auto-chérissement. Ici, nous faisons une distinction, en disant que le problème vient du chérissement de soi. Mais en fait, nous devons penser à ces deux éléments ensemble : le chérissement de soi et la recherche d'un soi dûment établi, réellement existant.

Les inconvénients du chérissement de soi, ou de l'attitude égoïste, sont abordés dans plusieurs parties de LEngagement dans la conduite du bodhisattva. Se référant à la fois au chérissement de soi et à la saisie d'un soi dûment établi, Shantideva dit : « Quelle que soit la violence dans le monde, quelles que soient la peur et la souffrance, tout cela provient de la saisie d'un soi : alors, à quoi me sert ce terrible démon ? » Ailleurs dans le texte, Shantideva souligne que notre auto-chérissement provient de notre propre esprit et de l'inconscience qu'il a de s'accrocher à un « moi » qui existe vraiment. C'est là notre véritable ennemi. Il écrit : « Ces ennemis de longue date et continus sont les seules causes de l'augmentation constante et massive de tous les maux. Comment puis-je être joyeux et ne pas être terrifié dans le samsara si je leur réserve une place sûre dans mon cœur ? »

Autrement dit, nous pensons fortement « moi, moi, moi », puis nous estimons que « je dois devenir heureux, je dois me débarrasser de mes problèmes ». De ce fait, nous oublions les autres et pensons que nos actions envers autrui n'ont pas d'importance pour l’obtention de notre propre bonheur. C’est sous l'emprise de cette ignorance que nous exploitons les autres et que nous faisons tout et n’importe quoi pour être heureux. Toutes les complications, tous les ennuis et tous les problèmes qui découlent de ce type de comportement peuvent être attribués à cette attitude de chérissement de soi et à la saisie d'une existence dûment établie.

Le Bouddha et nous sommes identiques du point de vue de l'existence de nos continuums mentaux depuis des temps immémoriaux. Mais qu'a accompli le Bouddha au cours de cette période ? En se débarrassant de son attitude égoïste et en se souciant des autres, il a pu atteindre l'illumination, alors que nous sommes toujours complètement impliqués dans l'égoïsme et que nous sommes donc toujours misérables, pleins d’ennuis et de problèmes. La cause de cette différence, puisque le Bouddha et nous vivons depuis le même temps, est déterminée par le facteur suivant : avons-nous ou non une attitude d'auto-chérissement, sommes-nous ou non égoïstes et préoccupés par nous-mêmes ? Tout ceci est lié aux inconvénients du samsara. Tous les problèmes récurrents et incontrôlables du samsara découlent de cette même racine. Chaque fois que nous avons convoité les diverses splendeurs du samsara, c'est aussi à cause de l'égoïsme, et nous nous sommes trompés nous-mêmes.

Ce sont les attitudes de la saisie d’un soi et d’auto-chérissement qui nous donnent le courage d'aller à la guerre et de faire toutes sortes de choses pour notre propre bénéfice. Ensuite, si quelque chose tourne mal, nous rejetons la faute sur nos propres gourous, sur nos parents, et ainsi de suite. Nous devons faire preuve du même courage pour surmonter notre attitude d'auto-chérissement.

Ces citations dans le texte disent toutes, de manière générale, que tout le mal vient du chérissement de soi. Si nous devions pointer du doigt le responsable de toutes les mauvaises choses qui nous arrivent, nous devrions pointer notre propre égoïsme, notre attitude d'auto-chérissement. C'est pourquoi il est temps de nous débarrasser de ce véritable ennemi. Comme l'écrit Shantideva : « Le temps d'avant, où tu me détruisais, était différent. Mais (maintenant) je te vois, alors où peux-tu aller ? Je vais te faire perdre toute ton arrogance. Débarrasse-toi maintenant de tout espoir pour ton propre intérêt. Je t'ai vendu à d'autres, alors ne pense pas à ta fatigue, j’ai offert toute ton énergie. Si, par insouciance, je ne te remets pas aux êtres limités, alors, c'est sûr, tu me remettras aux gardiens des royaumes sans joie. Tu m’as livré ainsi de nombreuses fois et j'ai été longtemps tourmenté, mais maintenant, me rappelant de ces rancunes, je vais t’écraser, toi, créature de l’égoïsme. » Toutes les fautes de l'égoïsme sont discutées de manière très détaillée dans LEngagement dans la conduite du bodhisattva et dans Un rituel d'offrande aux maîtres spirituels, la Pouja au Gourou (Bla-ma mchod-pa, Lama chopa).

Un Guéshé Kadampa avait l'habitude de dire que lorsque nous coupons notre brique de thé, nous devrions penser : « Je frappe la tête de l'auto-chérissement et de la saisie du soi. » Les personnes qui sont toujours totalement préoccupées par elles-mêmes, ou qui s'apitoient sans cesse sur leur sort lorsqu'elles sont malades, doivent examiner l'origine de tous leurs problèmes. Elles doivent réaliser qu'ils viennent du fait qu'elles sont toujours préoccupées par leur souci égoïste : « Je dois être heureux, je dois me débarrasser de tous mes problèmes. » Ce type de personne n'est jamais satisfait, quelle que soit la situation. Tout est toujours trop chaud ou trop froid, rien n'est jamais bien. La racine de leur problème est leur préoccupation égoïste. Si elles pouvaient y renoncer, elles pourraient se détendre. Au lieu de cela, elles sont toujours crispées et ne peuvent jamais trouver le repos, parce qu'elles sont toujours préoccupées par elles-mêmes.

Nous pouvons étudier et participer à des rituels de pouja autant que nous le souhaitons, mais si nous nourrissons toujours en nous l'attitude du chérissement de soi, nous perdons complètement notre temps. Si nous n'étions pas constamment préoccupés par nous-mêmes, par nos soucis égoïstes, mais que nous ouvrions au contraire notre cœur aux autres, nous pourrions vraiment disposer du vaste véhicule du cœur et de l’esprit qu'est le Mahayana. Mais parce que nos cœurs sont trop étroits et trop préoccupés par eux-mêmes, ils ne peuvent pas être ce vaste véhicule. Si nous sommes préoccupés par nous-mêmes, même si nous prétendons suivre le vaste véhicule de l'esprit du Mahayana, cela ne fait que nous donner l'occasion de devenir plus orgueilleux et arrogants.

Voilà qui conclut la discussion sur les inconvénients du chérissement de soi.

Les avantages du chérissement des autres

Le point suivant concerne les avantages de chérir les autres. 

[Namkapel explique ce point en insérant ici la ligne tirée de l'édition de Togmé Zangpo du texte de Guéshé Chekawa : « Méditez avec une grande bonté envers tout le monde. » Pabongka fait de même dans son édition.]

Il est dit dans Un rituel d'offrande aux maîtres spirituels que chérir les autres est la porte d'entrée de toutes les bonnes qualités, et il en est bien ainsi. Ce point est abordé dans l'ouvrage de Chandrakirti intitulé S'engager dans la voie du milieu (dBu-ma-la 'jug-pa, Skt. Madhyamakavatara), où il est dit que la source des grandes réalisations des bouddhas est leur compassion. D'où vient cette compassion ? Elle provient de l'amour et de l'attention intense que l'on porte à autrui. Ainsi, la racine de tous les bonheurs et de toutes les qualités vient du fait de chérir les autres. Chérir autrui nous amène à développer l'amour et la compassion, qui nous amènent à développer un objectif de bodhichitta, qui lui-même nous mène à l'illumination. Tous ces vastes états d'esprit du Mahayana que sont l’amour, la compassion, la résolution exceptionnelle et la bodhichitta, visent autrui. Ainsi, la racine de toutes les bonnes qualités qui découlent de ces états d'esprit est le fait de chérir les autres.

La raison pour laquelle ces qualités s'améliorent continuellement et ne dégénèrent pas est également due au fait que l'on se focalise sur les autres et qu'on les chérit. De même, l'atteinte du résultat, à savoir la bouddhéité, découle de cette préoccupation constante pour les autres. Ainsi, la génération, le développement continu et l'atteinte du résultat de ces états d'esprit positifs proviennent tous du fait de chérir autrui. Même la force de l'influence éveillée des bouddhas est due aux autres, à l'intérêt qui leur est porté et au fait de les chérir.

Pour atteindre l'illumination, comme l’indiquent ces citations, nous avons besoin à la fois de l'influence éveillée des bouddhas et de tous les êtres limités aussi nombreux soient-ils. C'est sur la base de ces deux éléments que nous atteignons l'illumination. Son obtention ne peut se faire indépendamment des autres, mais doit au contraire se fonder sur notre objectif de leur apporter le plus grand bénéfice possible. Il ne suffit donc pas de respecter les bouddhas, il faut aussi respecter tous les êtres limités, puisque notre réalisation de l'éveil dépend tout autant de chacun d’entre eux. En ce sens, les bouddhas et tous les êtres limités sont égaux en bonté.

Toutes les bonnes qualités de la voie et les résultats du véhicule de l'esprit du Mahayana découlent du fait de chérir autrui. Une citation affirme que toutes les réalisations des meilleurs états de renaissance proviennent de l'aide apportée aux autres, alors que les pires états de renaissance proviennent du mal fait aux autres. Cela nous montre que l'expérience du bonheur provient de la bonté. Pour ceux qui suivent le véhicule d'esprit modeste du Hinayana, c'est parce qu'ils ne chérissent pas intensément les autres qu'ils ne sont pas en mesure d'atteindre la plus haute réalisation. En revanche, les bodhisattvas ont cette préoccupation intense pour autrui, et c'est pour cette raison qu'ils sont capables d'atteindre le plus haut degré d'illumination.

Une autre citation parle de la façon dont nous faisons du mal aux autres. De notre côté, notre esprit est rempli de l'habitude de se chérir soi-même. Quant aux autres êtres, ils ont des esprits indomptés qui, du fait de leur inconscience ou ignorance, sont remplis d'émotions perturbatrices. Celles-ci les conduisent dans toutes sortes de situations que nous trouvons dérangeantes et notre attitude d'auto-chérissement et notre égoïsme nous poussent alors à vouloir leur faire du mal. Nous pouvons le constater avec l'exemple des Chinois. Nous pouvons voir l'égoïsme à l'œuvre des deux côtés, causant du tort. C'est le résultat de l'accumulation passée de forces karmiques négatives de part et d'autre, et nous accumulons maintenant davantage de forces karmiques négatives en raison de nos actions destructrices impulsives. Ces actions ne feront qu'engendrer d'autres situations à l'avenir, qui nous causeront encore plus de mal.

La patience

Pour se débarrasser de toutes ces choses qui nous nuisent, le texte nous demande de développer les deux bodhichittas et les six attitudes de grandes portées (les six perfections, les six paramitas). Pour développer la bodhichitta, il faut avoir un véritable souci des autres et une grande tolérance. Pour développer la tolérance, il est nécessaire d'avoir des ennemis. S'il n'y avait pas de personnes odieuses, pas d'ennemis, il n'y aurait aucun moyen pour nous de développer la patience et la tolérance.

Lorsque nous examinons ce qui nous amènera à l'éveil, à savoir les véritables cessations et les véritables cheminements de l'esprit, aucun d'entre eux n'a l'attitude de vouloir nous être bénéfique ou de nous nuire. Les véritables cessations sont des phénomènes statiques, ils n'ont donc pas d'attitude. Les véritables cheminements de l'esprit sont simplement des états d'esprit, et ils n'ont pas de motivation particulière ou de souhait de nous aider à atteindre l'illumination. Regardons ce qu’il en est des ennemis, des amis, etc. : ce sont eux qui nous apportent le bonheur ou le malheur, mais pas seulement en termes de douleur physique. Par exemple, nous n’allons pas considérer un médecin qui nous fait une injection ou qui nous opère, et qui par conséquent nous fait souffrir, comme un ennemi. Cela s'explique par le fait qu'il souhaite nous faire du bien et non nous nuire. Par conséquent, les ennemis sont appelés ainsi non pas en fonction du fait qu'ils ont des couteaux ou des pistolets dans leurs mains, mais plutôt en fonction de leur attitude qui consiste à nous vouloir du mal. Ainsi, si nous voulons développer la patience et la tolérance, il est nécessaire d'être confronté à des individus qui ont cette intention néfaste. C'est sur la base de notre tolérance que nous pourrons nous développer et atteindre l'illumination.

Dans un récit des vies antérieures du Bouddha, on raconte l'histoire de Minag Dungdung, le rameur d'un bateau sur lequel se trouvaient cinq cents marchands. Minag Dundung voulait tous les tuer. Le capitaine du bateau, qui était une incarnation antérieure du Bouddha, pensait que laisser cette personne tuer tout le monde n'était pas une bonne chose. Il était inutile d’essayer de l’en empêcher, car il n'écouterait pas. Le Bouddha s'est donc dit : « Si je tue cette personne, il s'agit bien sûr d'une action destructrice qui accumulera une force négative sur mon continuum mental du fait d'avoir tué quelqu’un. Mais si je ne le tue pas parce que je me chéris et que je ne veux pas accumuler de potentiel négatif pour moi-même, il va accumuler une force négative bien plus grande en tuant cinq cents personnes et toutes ces personnes perdront la vie. » C'est donc par compassion et par souci pour les cinq cents personnes qui se trouvaient sur le bateau et pour le rameur que le Bouddha a tué Minag Dungdung. Un exemple pertinent est celui des euthanasies que les médecins et les vétérinaires peuvent pratiquer pour aider des êtres dans des situations de douleurs insupportables, en leur injectant des produits chimiques pour les tuer. Ces praticiens n'ont pas une attitude de colère lorsqu'ils prennent ces vies, mais assument les conséquences de l'action négative juste pour aider ces êtres.

Tout acte énergique et déterminé de ce type doit être exécuté non pas avec une attitude de colère ou de volonté de nuire, mais avec une attitude de compassion, de volonté d'aider. Dans certaines situations, nous devons prendre des mesures fortes pour empêcher les gens de profiter de nous. Si nous pratiquons la bodhichitta, cela ne signifie pas que nous devons laisser tout le monde nous marcher dessus.

Nous devons donc prendre les mesures qui s'imposent en faisant preuve de compassion et d’une motivation pure afin de ne pas laisser les autres profiter de la situation. Nous ne devons pas nous engager dans des actions lorsque nous sommes en colère, lorsque nous sommes complètement emportés par l'illusion de la colère. Les choses que nous faisons sous le joug de la colère sont forcément pleines d'erreurs et nous causeront de l'embarras et des ennuis par la suite.

Kyabjé Ling Rimpotché m'a souvent raconté l'histoire d'un Chinois très enclin à la colère qui cassait ses objets préférés lors de ses crises. Puis, au bout d'un moment, sa colère s'apaisait et il ramassait les morceaux en pleurant.

Ce qu'il faut retenir, c'est que le cas de l'incarnation précédente du Bouddha tuant une personne qui avait l'intention d’en tuer cinq cents, ayant donc recours à la force pour faire du mal, n’est pas motivé par la haine, mais par la compassion. Il n’a pas agi dans un accès de colère, comme lorsque nous faisons des choses folles que nous regrettons par la suite. Comme nous l'avons dit plus haut, il s'agit d'une attitude qui consiste à être prêt à assumer le potentiel négatif découlant de cette action néfaste. De nombreuses citations tirées de LEngagement dans la conduite du bodhisattva illustrent la patience, la tolérance et la stabilité mentale à l'égard des ennemis. Nos ennemis nous aident à développer la tolérance, l'amour, la compassion, etc.

Certaines pratiques permettent de développer un sentiment d'égalité ou d'équanimité à l'égard des autres. Le principal problème est l'ennemi, celui qui nous met vraiment en colère et nous rend nerveux, quelqu'un qui est vraiment odieux et qui nous demande de faire beaucoup d'efforts pour ne pas se sentir dérangé. Pour mettre en œuvre ces pratiques, nous devons donc nous tourner vers quelqu'un qui est vraiment notre ennemi, quelqu'un que nous détestons, et essayer de développer une attitude d'amour envers lui. Nous devons trouver de l'intérêt et de la sympathie pour cette personne, qui ne demande qu'à être heureuse, et essayer de développer un véritable amour chaleureux alors même que nous la haïssions auparavant. Si nous y parvenons, c'est quelque chose d'extrêmement vaste et d'extrêmement puissant. LEngagement dans la conduite du bodhisattva est donc un enseignement tout à fait étonnant, parce qu'il propose une méthode très complète. Si nous pouvons développer un sentiment d'amour chaleureux et de sollicitude pour quelqu'un que nous haïssions auparavant et que nous considérions comme notre ennemi, nous développons vraiment un outil très puissant pour l'esprit et le cœur.

Les avantages de chérir les autres face aux inconvénients du chérissement de soi

En résumé, il n'y a pas grand-chose à ajouter sur les avantages et les inconvénients respectifs du chérissement de soi et du chérissement des autres, si ce n'est que dans Un rituel d'offrande aux maîtres spirituels, il est dit que la différence entre les bouddhas et nous-mêmes est qu'ils chérissent toujours les autres, alors que nous ne chérissons que nous-mêmes.

Regardons où nous en sommes, au niveau de l'histoire, ou au niveau de nos amis, des gens que nous connaissons. Les personnes que tout le monde admire sont celles qui se soucient beaucoup des autres. Il s'agit de changer nos attitudes pour que toute cette histoire de « je dois être heureux », de m'apitoyer sur mon sort, tout ce souci de soi et ce chérissement, soit appliquée à un autre objet. Au lieu de « je dois être heureux », nous devons penser que les autres ont besoin d'être heureux. Et au lieu de dire «je me sens malheureux » et de penser « je dois me débarrasser de cela », nous devons changer d'objet et penser que les autres doivent se débarrasser de leurs problèmes. Il s'agit de changer de point de vue, d'échanger nos attitudes à l'égard de soi et des autres. Cela implique de donner du bonheur aux autres, d'avoir vraiment de l'amour et de l'intérêt pour eux, et d'assumer leur souffrance avec compassion. Dans certains textes, la compassion consiste d'abord à prendre en charge la souffrance des autres, puis à leur donner du bonheur. Dans ce texte, nous donnons d'abord du bonheur, puis nous prenons en charge la souffrance des autres. Ce que nous faisons en premier n'a pas vraiment d'importance, mais comme le dit le texte, nous alternons les deux.

[La ligne commentée ici dit : « Entraînez-vous à donner et à prendre en alternance.”]

Si quelqu'un nous blesse ou nous fait du mal, au lieu de penser à la façon de riposter, de le blesser en retour, ce qui n’aidera personne, nous devons penser que nous cherchons à atteindre l’éveil pour le bénéfice de tous les êtres, ce qui inclut certainement cet être particulier ici présent. Nous essayons de nous développer et de nous améliorer afin d'être d’un bénéfice absolu, et cela inclut le bien de cette personne.

Donner du bonheur aux autres

Nous pouvons donner aux autres en faisant don de notre corps, de notre richesse, ou encore des racines de nos potentiels positifs afin qu'ils mûrissent sur les autres. La source de cette pratique se trouve dans LEngagement dans la conduite du bodhisattva. Pour donner notre corps, nous prions d'abord pour l'inspiration, puis nous pensons aux êtres des différents royaumes sans joie, tels que les enfers de la répétition incessante, ou d'autres dans les enfers chauds et ainsi de suite, et nous pensons par exemple à transformer notre corps en pluie rafraîchissante. En fait, nous pensons à tout ce dont ces êtres ont besoin pour soulager leurs souffrances : pour les assoiffés, nous nous transformons en quelque chose qui étanche leur soif, pour les affamés, en quelque chose qui apaise leur faim. Nous transformons notre corps en ce dont les êtres des royaumes sans joie ont besoin et endossons la souffrance de leur situation désastreuse. Pour stabiliser cela, nous transformons notre corps en toutes les qualités positives dont ils auront besoin pour atteindre l'illumination, comme les sept joyaux d’un arya.

Pour le royaume des esprits avides, nous les soulageons de tous leurs problèmes et de toutes leurs souffrances et nous leur donnons toutes les réalisations dont ils ont besoin pour atteindre l'illumination. Nous faisons de même pour les animaux et les êtres humains qui n'ont aucune situation de loisir pour pratiquer le Dharma. Nous transformons notre corps en toutes les opportunités et tous les enseignements dont ils ont besoin. Enfin, nous faisons la même chose pour les dieux et les demi-dieux des royaumes divins. Plus généralement, nous donnons un logement et des vêtements à ceux qui en ont besoin. De même, pour celles et ceux qui pratiquent le véhicule d’esprit modeste  du Hinayana, nous transformons notre corps en réalisations afin qu'ils puissent atteindre l’éveil.

Ensuite, nous transformons notre corps en diverses sortes d'environnement pour aider les autres. Le texte décrit toutes sortes d'images des terres pures, des arbres de joyaux, etc. Si nous n'avons jamais vu ce genre de choses, cela peut être un peu difficile à imaginer, mais nous pouvons simplement penser à l'endroit le plus magnifique que nous puissions concevoir et nous imaginons le donner à tous les êtres. Le don de notre corps comprend le don de toutes nos possessions et choses dont nous nous servons. Nous les transformons sous leurs formes les plus attrayantes et nous imaginons les donner à d'autres personnes dans le besoin. Lorsqu'il s'agit de donner nos potentiels positifs, nous donnons tous ceux que nous avons accumulés dans le passé, ceux que nous accumulons actuellement et ceux que nous accumulerons à l'avenir. Nous donnons tous ces potentiels à d'autres, en souhaitant que les résultats bénéfiques mûrissent sur eux.

Lorsque nous parlons de ces méditations, nous pourrions toutefois penser qu'elles n'aident personne dans les faits, que nous ne faisons qu’imaginer donner toutes nos richesses et les racines de nos potentiels positifs à autrui. Si nous nous demandons si cela peut avoir une utilité pratique, la réponse est que si nous n'en faisons pas une habitude bénéfique de l’esprit, nous ne serons pas en mesure de donner réellement notre corps et nos biens à l'avenir. C’est donc en construisant les potentiels et les bonnes habitudes de l’esprit maintenant que la force karmique peut s’accumuler sur notre continuum mental, qui mûrira dans le futur en notre capacité réelle à tout donner aux autres.

Le commentaire nous dit que lorsque nous avons une tradition familiale de faire une certaine chose sur sept générations, cela ajoute de la force pour que cette tradition perdure. De même, si nous développons une certaine tradition maintenant, comme celle de donner aux autres, alors après un certain temps, disons dans sept vies futures, elle aura la force puissante d’une tradition familiale. Ainsi, la pratique de donner aux autres est le fruit de l'amour et du souci de rendre les autres heureux. Puisque ces personnes sont pauvres et dans le besoin, nous utilisons tout ce que nous avons pour les soulager de leur manque de bonheur ou de tout ce qui leur fait défaut. Nous devons donner à tout le monde, y compris aux gourous et aux bouddhas. Mais lorsqu'il s'agit d'endosser la souffrance d’autrui, nous n'avons pas besoin de prendre sur nous celles des bouddhas et des mentors spirituels, puisqu’ils sont dépourvus de toutes fautes et de toutes souffrances. 

Avec compassion, prendre sur nous les souffrances des autres

Le second point parle de la compassion pour les autres. Si nous avons de la compassion pour les autres, toutes les bonnes qualités et les bonnes choses viendront à nous, même si nous ne prions pas pour qu’elles arrivent. Inversement, si nous n'avons pas un cœur compatissant et généreux, même si nous prions pour obtenir des choses, nous ne les obtiendrons pas. Si le courage nous fait défaut, nous pouvons penser à prendre sur nous toutes les souffrances futures de tous les êtres. Pour nous familiariser avec cela, nous pensons à nos propres problèmes et à nos souffrances dans cette vie et dans l'avenir. Nous pouvons commencer par penser : « Il vaut mieux que je les vive maintenant, quand il m'est plus facile de les gérer, sinon, je devrai en faire l’expérience plus tard, quand j’en serai beaucoup moins capable. » De cette manière, nous acquérons une familiarité qui nous aidera à prendre en charge les problèmes des autres. Nous nous entraînons ainsi par étapes, en prenant sur nous les problèmes de demain, de l'année prochaine et ainsi de suite, afin de développer le courage d’endosser les difficultés et les souffrances des autres.

Le but est de se débarrasser de l'égoïsme dans nos cœurs, et nous y parvenons en nous ouvrant aux problèmes des autres et en les prenant en charge. Le texte continue d'expliquer comment nous prenons la responsabilité des problèmes des autres qui se trouvent sur différents chemins et niveaux spirituels, jusqu'aux bouddhas et aux mentors spirituels, mais sans inclure ces derniers.

Après nous être familiarisés avec ce processus, nous pouvons combiner notre respiration avec le fait de prendre en charge les problèmes des autres. Nous inspirons en acceptant les problèmes, puis nous expirons en envoyant du bonheur.

[Cette explication et ce qui suit sont un commentaire des lignes du texte racine : « Pour ce qui est de l'ordre, commencez par soi-même, en montant ces deux-là sur la respiration. (En ce qui concerne) les trois objets, (prendre) les trois attitudes empoisonnées et (donner) les trois racines de ce qui est constructif. Les instructions pour après l'absorption sont, en bref, de sefforcer à rester conscient de cela en s'entraînant avec des mots dans tous nos agissements. » Dans l'édition de Togmé Zangpo, la ligne « Pour ce qui est de l'ordre, commencer par soi-même » suit « lentraînement avec des mots dans tous nos agissements ». L'édition de Pabongka suit l'ordre de Namkapel, comme ci-dessus.]

Le texte parle de s'occuper des trois objets et des trois attitudes empoisonnées. Les trois objets sont les objets agréables, désagréables et neutres qui nous font développer les trois attitudes empoisonnées que sont l'attachement, l'aversion ou l'indifférence. De plus, nous devons penser au fait que tous les autres êtres développent également de l'attachement, de l'aversion ou de l'indifférence et nous devons alors nous dire : « Que tout leur attachement, leur aversion et leur indifférence m'atteignent. Je vais m'en occuper et m'en débarrasser pour eux. Qu'ils soient complètement libérés de tout attachement, de toute aversion et de toute indifférence », et nous leur offrons en retour toutes ces sagesses.

Le rituel d'offrande aux maîtres spirituels dit: « Par conséquent, gourous compatissants, ennoblissants et impeccables, inspirez-moi pour que toutes les forces négatives, les obstacles et les souffrances des êtres errants, mes mères, mûrissent sur moi en ce moment, et que je puisse transmettre mon bonheur et mes forces positives aux autres et placer ainsi tous les errants dans la félicité. » C'est là la façon de s'entraîner avec des mots, en répétant ces prières : « Que leurs souffrances mûrissent sur moi et que ma bonté mûrisse sur les autres. »

Il s'agit ici de s'entraîner à développer des pensées bienveillantes, afin que tous les êtres soient heureux, y compris les Chinois. Il se peut que nous nous trouvions dans une situation où les autres placent tout leur espoir en nous et pensent que nous pourrons les aider, et que malgré notre volonté, nous n'ayons pas la capacité réelle de le faire. C'est très difficile. Nous devons donc réaliser que la seule façon d'aider véritablement tous les êtres est de devenir nous-mêmes des bouddhas.

Nous pourrions penser : « Que se passe-t-il ici ? Il y a eu tous ces bouddhas du passé, ces êtres qui ont atteint l’illumination. Eux sont capables d'aider tous les êtres, alors pourquoi devrais-je le faire ? Pourquoi cela dépend-il de moi de devenir éveillé, puisqu'il y a tous ces autres qui le sont déjà ? » Ce type de pensée pourrait nous décourager. Mais plutôt que de suivre ces réflexions, nous ferions mieux de considérer qu'il y a beaucoup d'êtres qui ont un lien karmique spécial avec nous, qui n'ont pas eu de relation karmique particulièrement étroite avec les bouddhas du passé, et qui n'ont donc pas pu être directement libérés par eux en ce temps-là. Nous devons donc penser à tous les êtres qui ont un lien spécial avec nous, et nous aurons alors plus de courage pour devenir nous-mêmes éveillés afin de les aider. Nous devons établir des liens de plus en plus positifs avec les êtres avec lesquels nous sommes en relation.

Top